Source : maschinengeschrieben, CC BY-SA
Tandis que le PDG de Google France annonce d’importants recrutements, le géant de l’Internet poursuit une tournée auprès de 100 villes de France sous le signe de la formation au numérique. Or, les résultats de travaux de plus en plus nombreux à se pencher sur le pouvoir exercé par les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) sur nos sociétés vont à l’encontre de la perception très positive dont témoignent bon nombre d’utilisateurs à l’égard de Google (universitaires y compris).
Source : Débat : Google est‑il l’ami de la production et de la circulation des idées ?
Alors que, sur le même support, un universitaire se demande s’il ne faudrait pas considérer Google comme un service public, la réflexion de Julien Falgas apparaît beaucoup plus lucide et éclairée.
Bien sûr que Google rend des services à un grand nombre d’utilisateurs chaque jour dans le monde. Mais contrairement à ce que l’on pense, ils ne sont pas gratuits, bien loin de là. Si nous ne les payons pas en monnaie sonnante et trébuchante à chaque utilisation, ils nous coûtent en réalité deux fois, de deux manières différentes.
D’une part, chaque fois que nous achetons les produits ou services qui font de la publicité via Google, que nous les acquérions ou non via une annonce Google, nous payons avec le produit une partie du prix de la publicité faite par l’annonceur dans Google.
D’autre part, c’est le sujet de l’article de Julien Falgas, et c’est nettement plus préoccupant, nous payons chaque utilisation de notre liberté de penser, façonnée par l’ordre et la manière dont Google nous présente ses résultats de recherche.
On peut évidemment en dire autant de beaucoup de médias vivant de la publicité, sur Internet ou à la TV, qui cherchent à nous manipuler, et y parviennent beaucoup plus souvent qu’on ne le croit, et en outre polluent toutes nos consultations & visionnages d’incitations à consommer, souvent très éloignées de nos intentions lorsque nous voulons lire un article sur le net ou voir une émission de TV.
Si le débat est aujourd’hui également pollué, c’est parce que la doxa actuelle vise, de plus en plus, à rentabiliser ou externaliser les services publics, et rend les frontières floues. Cela tend à déplacer le débat sur gratuit / payant, alors qu’il faudrait s’interroger sur intérêt collectif / intérêts privés.
Personnellement, j’ai la chance d’avoir les moyens de payer des impôts, et je préfère contribuer par ces impôts au financement de services publics utiles à toutes et tous, qui seraient de facto gratuits pour les moins riches d’entre nous si l’impôt était réellement progressif et redistributif – ce qui certes est de moins en moins vrai par les temps qui courent.
Quant à ceux qui tirent profit financier de leurs activités, même si elles semblent gratuites pour (à) une grande partie des utilisateurs, qu’ils paient des impôts sur chaque territoire où ils exercent leur activité, à hauteur du profit qu’ils en retirent. Cela permettra de financer plus largement des services d’intérêt collectif dans le respect de notre souveraineté nationale et de la démocratie. Car, même si nous ne sommes pas toujours satisfaits, loin s’en faut, des mesures prises par ceux que nous élisons, ce sont eux qui décident quoi faire de l’argent public : des écoles, des routes, des hôpitaux… et des informations ou des services gratuits accessibles à tous sur Internet.
Et pour en finir avec Google, à tous les sens du terme, rappelons qu’il existe Qwant, un moteur de recherche gratuit, européen, qui respecte la vie privée de ses utilisateurs, et non pollué par la publicité. Ah, cela ne ressemblerait-il pas à un vrai service public ?