Depuis l’annonce du parachute doré de Michel Combes (près de 14 millions d’euros) alors qu’il quitte Alcatel-Lucent pour entrer chez Altice et prendre la direction de SFR-Numericable, « tout le monde s’étrangle », comme le titrait assez justement Le Point ce mardi :
- Des journalistes dénoncent « 1 000 ans de SMIC (il faudrait avoir travaillé depuis le Moyen-Age pour avoir accumulé pareille somme) pour 10 000 emplois supprimés en deux ans ».
- Le Medef s’est dit « choqué » (mais à part « étudier le dossier », n’a spontanément prévu aucune mesure particulière…).
- Les décodeurs ont quant à eux calculé que la prime représente 218 années de salaire moyen chez Alcatel Lucent (lequel salaire moyen est donc à peu près 5 fois le SMIC si tout le monde suit bien).
- Si l’intéressé a défendu son bilan dans Le Monde pour justifier sa prime, FranceTVinfo a interrogé un spécialiste des rétributions de dirigeants, qui se montre moins convaincu sur la pertinence d’un pareil montant, et des conditions dans lesquelles il lui est attribué.
- La CFE-CGC Alcatel-Lucent dénonce que le redressement de l’entreprise « s’est fait au prix d’un plan social d’une violence sans précédent ».
- Emmanuel Macron, qui en mai félicitait Michel Combes pour son nouveau poste chez Altice (selon Challenges), a finalement « souhaité que le Haut Comité sur le gouvernement d’entreprise (HCGE) et l’Autorité des marchés financiers rendent des avis sur les conditions de son départ et qu’Alcatel-Lucent puisse en tirer les conséquences » et « a manifesté son mécontentement à propos de la décision de Michel Combes de quitter Alcatel-Lucent avant même la finalisation du rapprochement du groupe avec le finlandais Nokia » (propos recueillis auprès de l’entourage du Ministre dans une dépêche Reuters).
Globalement, tout le monde s’accorde sur le fait que l’attribution de ce parachute doré est quelque peu tirée par les cheveux, qu’il s’agisse du montant, de la pertinence, des modalités de calcul, ou du timing d’amendement des clauses de l’indemnité de départ de Michel Combes, qui quitte Alcatel-Lucent de son plein gré rappelons-le.
Pour le moment, tout le monde s’insurge, mais nul ne sait comment se finira l’histoire…
Faut-il ajouter un peu d’huile sur le feu ?
Chez France Télécom-Orange, on connaît aussi Michel Combes, qui fut notamment Directeur financier sous la présidence de Thierry Breton, avant d’être remercié par Didier Lombard en 2006.
Et si son parcours dans les télécoms retracé par Le Figaro rapporte le témoignage positif d’un ancien collaborateur : «Michel Combes a laissé un très bon souvenir à tous ceux qui ont travaillé avec lui, chez France Telecom», une petite plongée dans les archives de BFM Business révèle un portrait moins flatteur.
Partout où il est passé pour « redresser » les entreprises, il l’a fait avec une grande brutalité en matière de suppressions de postes, avec pour préoccupation essentielle le redressement financier à court terme par la réduction des coûts ou des « ficelles » financières qui améliorent certains ratios mais entravent la capacité d’investissement de l’entreprise, comme le rachat d’actions. Si une telle politique peut en effet satisfaire les actionnaires, pour lesquels le rendement financier s’améliore quasi instantanément, et faire remonter le cours de l’action, l’efficacité économique de long terme (pérennisation et développement de l’entreprise, de son CA et de ses positions sur le marché, préservation et développement de l’emploi…) est nettement plus douteuse.
Pour sa part, la CFE-CGC Orange s’interroge sur le bénéfice collectif de ces politiques financières d’écrémage qui permettent à une poignée de dirigeants et d’investisseurs de capter la richesse, tandis que le chômage continue de croître et que l’ancienne belle place mondiale des acteurs français de la filière des télécoms n’est plus qu’un lointain souvenir…
(à mettre en lien avec les propos de Joseph Stiglitz, cité dans notre précédent billet…)
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