Une proposition de loi « visant à mieux garantir le droit à la vie privée à l’heure du numérique» a été déposée par plusieurs sénateurs, et adoptée par la Chambre haute, en attendant de passer au filtre des députés – le gouvernement serait peu favorable à cette proposition.
Image de fredpallu (Flickr) sous licence CC by-nc-sa
Ce texte, s’il est adopté en l’état, imposera aux sites Internet un droit à l’oubli en les obligeant à effacer toutes les données personnelles d’un utilisateur, sur simple demande. Mais cette proposition de loi ne va pas très loin, face à l’ampleur du problème: quelle maîtrise avons-nous de nos données, de ce qui est fait de nous sur la bien-nommée Toile?
« Le citoyen devient people »
Pour la CFE-CGC/Unsa de France Télécom Orange (communiqué), «le citoyen devient “people” à son corps défendant»: «De nombreux citoyens refusent d’être présents dans les réseaux sociaux tels que Facebook, LinkedIn ou Viadeo, ou ne veulent y être que pour des raisons professionnelles. Pour autant, ce n’est pas si facile de maîtriser cette absence, ou cette présence très circonscrite. Qui n’a pas déjà été identifié sur une photo via Facebook à son insu? Chaque citoyen devrait pourtant avoir le droit de refuser la publication de photos ou d’informations relatives à sa vie privée.»
On a vu le nouveau patron du MI6, les services secrets britanniques, dévoilé sur Internet par son épouse qui avait posté photos et adresse sans y prendre garde. De même le propre créateur de Facebook s’est-il fait piéger par le changement des règles de confidentialité de son site.
De plus, souligne le syndicat, les activités d’un homonyme peuvent venir salir l’image d’une personne, comme on l’a vu avec l’affaire Ali Soumaré, candidat aux régionales qui s’est vu traiter à tort de « délinquant multirécidiviste chevronné » par des adversaires politiques. Ou encore avec les tribulations d’une femme portant le même nom qu’une actrice de films porno.
« La rencontre de Google et des renseignements généraux »
Les recruteurs ont maintenant pour réflexe de «scanner» un candidat sur Internet, mais les sénateurs n’ont pas jugé bon d’entendre des représentants syndicaux. Dans le même temps, ils ont reçu en revanche des représentants de Google et Facebook.
Autre point préoccupant, relève la CFE-CGC/Unsa, l’acquisition du site 123people.com par PagesJaunes. Le second, issu de l’ancien monopole de l’annuaire téléphonique, a une image de sérieux qui va bénéficier au premier (« la rencontre de Google et des renseignements généraux », selon Rue89), qui agrège pourtant des données disparates et loin d’être toujours fiables sur les personnes.
Pour le PDG de Google, pas de bonne raison de cacher quoi que ce soit
Le mépris que manifestent volontiers les dirigeants des grandes entreprises du Net n’a rien pour rassurer. En décembre, Eric Schmidt, le CEO de Google, jugeait que seuls les criminels ont des choses à cacher, en déclarant: «Si vous faites quelque chose et que vous ne voulez que personne ne le sache, peut-être devriez-vous déjà commencer par ne pas le faire.»
Le mois suivant, c’était au tour de Mark Zuckerberg, le CEO et créateur de Facebook, d’affirmer que la notion de vie privée est quasiment périmée, en décrétant que «les gens sont à l’aise, non seulement avec le fait de partager plus d’informations différentes, mais ils sont également plus ouverts, et à plus de personnes. La norme sociale a évolué ces dernières années.»
Des propos évidemment dans le sens des intérêts de leurs entreprises, qui inquiètent. Y compris le président de la Cnil, Alex Türk, qui vient d’estimer qu’il faudra 15 à 20 ans pour que les États s’accordent sur des principes en termes de protection de la vie privée et les appliquent.
L’Acta, une négociation en coulisses
Pendant ce temps, des négociations internationales ont bien lieu… mais loin du contrôle des parlementaires des différents pays, dans le cas de l’Acta (Accord commercial anti-contrefaçon), un texte débattu dans une opacité scandaleuse, alors même qu’il pourrait renforcer les filtrages d’Internet et donc avoir un impact sur tous («Et les inciter [les FAI] ainsi à filtrer, couper, bloquer, sans passer par l’autorité judiciaire, quitte à ne pas se soucier trop de la réalité des piratages ainsi punis», relève Le Monde diplomatique). Voir le dossier qu’y consacre la Quadrature du Net et les articles du Monde diplomatique, comme celui-ci, de mars, par Florent Latrive).
L’usage d’Internet, de plus en plus intégré à tous les actes du quotidien, fait de l’identité numérique un vrai sujet de société, qui nécessite davantage qu’un simple toilettage de nos lois, souligne la CFE-CGC/Unsa. Une instance de médiation et de contrôle est sans doute nécessaire pour faciliter la protection du citoyen et l’application de la loi.
Cela pourrait être la Cnil, qui dans ce cas devrait voir ses moyens renforcés, pour pouvoir exercer pleinement ses missions. Le syndicat demande en conséquence la création d’une mission parlementaire, « qui traite la question de manière approfondie, afin de proposer des mesures réellement protectrices pour chaque citoyen » .
A lire aussi
La proposition de loi sur le site du Sénat
Vers une vie privée en réseau, article de Jean-Marc Manach (BugBrother) qui expose les thèses des partisans de la fin de la vie privée et de ceux qui y voient le rêve d’une société totalitaire
Protection de la vie privée et de l’identité numérique: une proposition de loi en attendant mieux
Une proposition de loi « visant à mieux garantir le droit à la vie privée à l’heure du numérique » a été déposée par plusieurs sénateurs, et adopté par la Chambre haure, en attendant de passer au filtre des députés – le gouvernement semble peu favorable à cette proposition.
http://www.zdnet.fr/actualites/internet/0,39020774,39750388,00.htm
Le texte, s’il est adopté en l’état, imposerait aux sites Internet d’effacer toutes les données personnelles d’un utilisateur, sur simple demande.
Mais cette proposition de loi ne va pas très loin, face à l’ampleur du problème: quelle maîtrise avons-nous de nos données, de ce qui est fait de nous sur la bien-nommée Toile?
Pour la CFE-CGC-Unsa de France Télécom (communiqué) LIEN
« Le citoyen devient “people” à son corps défendant »:
« De nombreux citoyens refusent d’être présents dans les réseaux sociaux tels que Facebook, LinkedIn ou Viadeo, ou ne veulent y être que pour des raisons professionnelles. Pour autant, ce n’est pas si facile de maîtriser cette absence, ou cette présence très circonscrite. Qui n’a pas déjà été identifié sur une photo via Facebook à son insu ? Chaque citoyen devrait pourtant avoir le droit de refuser la publication de photos ou d’informations relatives à sa vie privée. »
On a vu le nouveau patron du MI6, les services secrets britanniques, dévoilé sur Internet par son épouse qui avait posté photos et adresse sans y prendre garde. De même le propre créateur de Facebook s’est-il fait piéger par le changement des règles de confidentialité de son site.
De même, souligne le syndicat, les activités d’un homonyme peuvent venir salir l’image d’une personne, comme on l’a vu avec l’affaire Ali Soumaré, candidat aux régionales qui s’est vu traiter à tort de « délinquant multirécidiviste chevronné » par des adversaires politiques. Ou encore avec les tribulations d’une femme portant le même nom qu’une actrice de films porno.
http://www.liberation.fr/actualite/010116553-la-star-du-porno-katsumi-condamnee-a-verser-20-000-euros-a-une-homonyme
Alors que les recruteurs ont maintenant pour réflexe de « scanner » un candidat sur Internet, les sénateurs n’ont pas jugé bon d’entendre des représentants syndicaux. Dans le même temps, ils ont reçu en revanche des représentants de Google et Facebook entre autres.
Autre point préoccupant, relève la CFE-CGC-Unsa, l’acquisition du site 123people.com par PagesJaunes. Le second, issu de l’ancien monopole de l’annuaire téléphonique, a une image de sérieux qui va bénéficier au premier, qui agrège pourtant des données disparates et loin d’être toujours fiables sur les personnes.
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Le mépris que manifestent volontiers les dirigeants des grandes entreprises du Net n’a rien pour rassurer. En décembre, Eric Schmidt, le CEO de Google, jugeait que seuls les criminels ont des choses à cacher, en déclarant: « Si vous faites quelque chose et que vous ne voulez que personne ne le sache, peut-être devriez-vous déjà commencer par ne pas le faire »
http://www.zdnet.fr/actualites/internet/0,39020774,39711378,00.htm
Le mois suivant, c’était au tour de Mark Zuckerberg ORTHO le CEO et créateur de Facebook, d’affirmer que la notion de vie privée est quasiment périmée,
http://www.zdnet.fr/actualites/internet/0,39020774,39712119,00.htm
décrétant que « les gens sont à l’aise, non seulement avec le fait de partager plus d’informations différentes, mais ils sont également plus ouverts, et à plus de personnes. La norme sociale a évolué ces dernières années. »
Des propos évidemment dans le sens des intérêts de leurs entreprises, qui inquiètent. Y compris le président de la Cnil, Alex Türk, qui vient d’estimer qu’il faudra 15 à 20 ans pour que les Etats s’accordent sur des principes en termes de protection de la vie privée et les appliquent.
http://www.zdnet.fr/actualites/internet/0,39020774,39750580,00.htm
Pendant ce temps, des négociations internationales ont bien lieu… mais loin du contrôle des parlementaires des différents pays, dans le cas de l’Acta (Accord commercial anti-contrefaçon), un texte débattu dans une opacité scandaleuse, alors même qu’il pourrait renforcer les filtrages d’Internet et donc avoir un impact sur tous (« Et les inciter [les FAI] ainsi à filtrer, couper, bloquer, sans passer par l’autorité judiciaire, quitte à ne pas se soucier trop de la réalité des piratages ainsi punis », Le Monde diplomatique). . Voir le dossier qu’y consacre la Quadrature du Net et les articles du Monde diplomatique, comme celui-ci, de mars, par Florent Latrive).
http://www.laquadrature.net/fr/acta
http://www.monde-diplomatique.fr/2010/03/LATRIVE/18881
L’usage d’Internet, de plus en plus intégré à tous les actes du quotidien, fait de l’identité numérique un vrai sujet de société, qui nécessite davantage qu’un simple toilettage de nos lois, souligne la CFE-CGC/Unsa. Une instance de médiation et de contrôle est sans doute nécessaire pour faciliter la protection du citoyen et l’application de la loi. Cela pourrait être la Cnil, qui dans ce cas devrait voir ses moyens renforcés, pour pouvoir exercer pleinement ses missions. Le syndicat demande en conséquence la création d’une mission parlementaire, « qui traite la question de manière approfondie, afin de proposer des mesures réellement protectrices pour chaque citoyen « .
A lire en ligne VERIF INTITULE
La proposition de loi sur le site du Sénat
http://www.senat.fr/dossierleg/ppl09-093.html
Vers une vie privée en réseau, un passionnant article de Jean-Marc Manach, qui expose les différentes thèses, entre les partisans de la fin de la vie privée et ceux qui y voient le rêve d’une société totalitaire, et les frontières mouvantes du privé et du public à l’ère numérique.
http://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/03/26/vers-une-vie-privee-en-reseau_1324942_651865.html
C’est de la pure fatuité que de se croire important au point de vouloir absolument laisser des traces et des souvenirs de vie privée sur le NET; l’épouse du patron du MI6 n’a eu que ce qu’elle a mérité et il lui reste tout le loisir de méditer la leçon.
Les citoyens français doivent aussi se rappeler que les seuls cas où ils ont devoir de laisser des informations exactes sont les déclarations à l’Etat telles que prévues par la Loi (impôts mais aussi questionnaires statistiques INSEE); dans tous les autres cas il n’y a rien de répréhensible à déclarer des informations sur soi inexactes ou inventées; ainsi ceux qui ne souhaitent pas une avalanche de messages importuns d’anniversaire peuvent essaimer des dates de naissance tout au long de l’année; si les différents serveurs du web contenaient un minimum d’informations bidon, ceux qui les exploitent finiraient assez vite par se lasser.