Source : Le gouvernement affiche sa détermination à réformer vite et fort
Dans la newsletter des Échos, cet article figure sous le titre « Macron prend de front les syndicats ». Et c’est absolument la réalité : toutes les réformes en cours, à commencer par les ordonnances sur le code du travail, démontrent cette volonté de les sortir du jeu. C’est un calcul politique, et les Français peuvent peut-être suivre, au moins un temps : on leur bassine tellement que les syndicats sont un club de ringards que certains peuvent finir par le croire.
Mais qu’en sera-t-il quand les citoyens prendront conscience que, pour la plupart d’entre eux, les promesses ne sont pas tenues et qu’ils se retrouvent finalement fragilisés ? C’est déjà le cas en ce qui concerne le basculement d’une partie des charges sociales vers la CSG. En soi, l’idée n’était pas mauvaise. Le problème, c’est d’une part que le plein effet sur le pouvoir d’achat est différé (ce qui bénéficie aux salariés est toujours pour demain, mais nous l’avons déjà dit ici), d’autre part que les calculs sont incompréhensibles pour le commun des mortels. On attend toujours le gouvernement qui sera capable de préparer une mise en œuvre simple, compréhensible, et réellement conforme aux promesses faites, des mesures qu’il annonce.
Plus globalement, évacuer les médiateurs sociaux que sont les syndicats est toujours un mauvais calcul sur le moyen terme, pour au moins deux raisons :
- Les syndicat connaissent très concrètement leur contexte, les attentes des salariés qu’ils représentent, le degré d’acceptabilité des mesures proposées, et les problèmes concrets de mise en œuvre. Ils sont donc des garde-fous, mais ils sont aussi capables, quand on les traite bien et que les mesures vont dans le bon sens, de participer activement à l’explication et donc à la meilleure acceptation des mesures prises. Les passer à la trappe est toujours suspect, et laisse forcément penser qu’en réalité les mesures annoncées ne sont pas exactement telles qu’on veut bien nous les présenter. Les ordonnances sur le travail en sont un exemple flagrant.
- La disparition des médiateurs sociaux signifie également la disparition du dialogue. Et donc la fin de la démocratie. On peut utilement réécouter les cours de Pierre Rosanvallon au Collège de France à ce propos. Quant aux mouvements sociaux sans médiateurs, ils sont en général beaucoup plus violents et difficiles à régler qu’en présence d’organisations syndicales.
Nous ne pensons pas que les Français aient voté pour une dictature. Et s’ils se sentent floués cette fois encore, ce qui sortira des urnes ne sera pas forcément ce qui est espéré par ceux qui sont aujourd’hui à la manœuvre.