L’investissement dans le numérique, solution miracle pour doper la productivité française ?

Depuis le milieu des années 90, la France subit, comme l’ensemble de ses voisins européens, un ralentissement marqué de la croissance de sa productivité horaire de travail, désormais passée sous la barre des 1% par an, enregistrant, depuis la crise de 2008, un net décrochage par rapport aux Etats-Unis. A l’origine de cette constatation, France Stratégie, l’organisme gouvernemental d’études stratégiques et prospectives, vient de publier une note d’analyse sur les causes de ce phénomène.

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Pour une fois, ce n’est pas l’insupportable coût du travail qui est mis en cause, mais le manque d’investissement dans le numérique des entreprises tricolores, contrairement à leurs consœurs américaines. Plus qu’un sous-investissement, l’étude évoque un « mal-investissement », auquel s’ajoute une surprotection des entreprises vieillissantes et peu productives. Ainsi, le processus de « destruction créatrice », cher à Joseph Schumpeter, qui a eu lieu aux Etats-Unis, ne s’est pas pleinement produit, empêchant le renouvellement du tissu productif, tandis que les rigidités légales et réglementaires contribuent elles aussi à limiter le développement des entreprises les plus productives.

La bonne nouvelle, c’est que « la plus grande diffusion des technologies numériques et la recomposition d’une partie du tissu productif pourrait assurer un rebond non négligeable des gains de productivité ». Pour favoriser ce « rebond », le rapport France Stratégie dresse trois actions à suivre :

  • renforcer les compétences des salariés, à travers une politique d’éducation ambitieuse alliant réforme structurelle de la formation initiale et augmentation des moyens pour la formation continue ;
  • aider les entreprises les plus innovantes, via une simplification administrative et fiscale, des réformes pro-concurrentielles et une allocation prioritaire des aides ;
  • encourager la mobilité des travailleurs, en réduisant notamment la dualité des contrats (CDI vs. CDD), grâce à une révision du Code du travail – nous y voilà quand même –, assurant sécurité et flexibilité, pour inciter les salariés les plus qualifiés à prendre des risques pour rejoindre des entreprises plus innovantes.

Sources :
Article Au secours, les entreprises françaises ont oublié d’investir dans le numérique !
Note d’analyse de France Stratégie Comprendre le ralentissement de la productivité en France

Travail et numérique : aux Etats-Unis, on laisse l’innovation se développer avant de légiférer

Vendredi dernier s’est tenue à Paris, au siège de l’OCDE, une rencontre des ministres du Travail des pays membres. Chercheurs, syndicalistes et politiques ont esquissé leur vision de l’avenir du travail à l’heure de la mondialisation et de la numérisation.

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A cette occasion, le Secrétaire d’état au Travail des Etats-Unis, Thomas Perez a accepté de répondre aux questions de L’Usine Digitale, explicitant notamment l’attitude libérale adoptée Outre-Atlantique face à la transformation du travail sous l’effet du numérique. Selon lui, l’important est de laisser l’innovation technologique se développer et de « s’en emparer à bras le corps », avant de légiférer sur la protection des travailleurs pour rendre l’innovation « inclusive ».

Top chrono pour une interview à l’américaine, en dix minutes et entre deux portes

Des millions d’emplois menacés par la « quatrième révolution industrielle »

Le rapport sur le futur de l’emploi (à consulter en version complète ou en résumé) publié hier par le World Economic Forum (WEF), à l’occasion de l’édition 2016 du Forum de Davos qui s’ouvre demain, n’est pas très réjouissant. Il s’appuie sur une étude menée dans les 15 premières économies mondiales, pays ou groupements de pays qui totalisent environ 65 % de la main d’œuvre mondiale. Ce rapport nous annonce que la « quatrième révolution industrielle » (autour de technologies émergentes comme le cloud computing, le Big Data, l’Internet des Objets, la robotique, l’intelligence artificielle, etc.) va provoquer la disparition de plus de 5 millions de postes dans le monde d’ici à 2020.

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En effet, les quelques 2 millions de postes créés dans des domaines spécifiques tels que l’informatique, les mathématiques et l’ingénierie, ne suffiront pas à compenser les 7 millions d’emplois perdus « en raison des sureffectifs, de l’automatisation et de la désintermédiation ». Le rapport du WEF détaille secteur par secteur et pays par pays l’impact d’une révolution qui affectera tout particulièrement les travailleurs en « col blanc » et le personnel administratif. Par ailleurs, la main d’œuvre féminine sera relativement plus pénalisée : seulement 48% des 7 millions d’emplois menacés sont actuellement occupés par des femmes, mais leur moindre proportion dans le marché global du travail et leur sous-représentation dans les secteurs appelés à croître maximisent l’impact de cette évolution sur leur activité.

Au-delà d’une automatisation dont l’impact sur l’emploi reste encore limité dans la majorité des secteurs, c’est le changement de nature du travail qui devrait le plus contribuer à ces pertes d’emplois. En rendant le travail possible de n’importe où et n’importe quand, les nouvelles technologies favorisent la fragmentation des tâches par les entreprises. En découle une nouvelle « économie des petits boulots » (« gig economy »), dans laquelle un travail jadis confié à un salarié est désormais proposé, via des plateformes numériques, à une multitude de travailleurs indépendants. La première grande substitution à venir ne serait donc pas celle du travailleur humain par les robots, mais celle du salarié par les « freelancers », provoquant ainsi la « désintermédiation » évoquée par le rapport WEF.

Source : Emploi : la peur de la grande substitution – Les Echos

L’inscription à Pôle Emploi passe désormais obligatoirement par Internet

A partir du 1er mars, toutes les demandes d’inscription à Pôle Emploi devront se faire en ligne. Cette procédure, testée dans plusieurs régions depuis octobre 2015, est désormais étendue à l’ensemble de la France.

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Comme le résume un des commentaires de l’article de Clubic, « la possibilité de le faire par internet, c’est cool, l’obligation, beaucoup moins ». Surtout si l’on considère que les 18% de Français qui ne disposent pas d’une connexion Internet à domicile figurent généralement parmi les populations les plus « fragiles », comme le montre l’édition 2015 du Baromètre du numérique du CREDOC (pages 41 à 44) : majoritairement plutôt âgés (mais environ 10% de non-internautes sont encore en âge de travailler), seuls, peu ou pas diplômés et disposant d’un faible niveau de revenus.
Toutefois, le décret pense à ces derniers en prévoyant qu’« à défaut de parvenir à s’inscrire lui-même par voie électronique, le travailleur recherchant un emploi peut procéder à cette inscription dans les services de Pôle emploi, également par voie électronique, et bénéficier le cas échéant de l’assistance du personnel de Pôle emploi ».

La Banque mondiale dénonce l’inégale répartition des « dividendes du numérique »

Dans son récent rapport sur « Les dividendes du numérique », l’agence spécialisée de l’ONU constate que près de 60% de la population mondiale n’a toujours pas accès à Internet, ce ratio passant à 85% si l’on ne considère que l’Internet haut débit. La fracture est moins visible avec la téléphonie mobile, mais au final ce sont les pays riches qui profitent de la majeure partie des retombées économiques liées au développement numérique.

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Accédez à la version courte du rapport de la Banque mondiale, énonçant les messages principaux, ou à la version intégrale.

Et si c’était le numérique qui freinait nos économies…

L’innovation numérique marque-t-elle le pas ? C’est la question qu’ont voulu poser l’Institut G9+, think tank sur le numérique, et l’IDATE, lors d’un colloque organisé le 1er décembre 2015 sur le thème « Les Paradoxes de l’Innovation Numérique : digital innovation versus digital innovation ? ». Décryptage des interventions à partir du compte rendu.

Source : Et si c’était le numérique qui freinait nos économies…

L’article mériterait d’être un peu plus approfondi, mais le questionnement est intéressant…

12 livres en 12 mois pour comprendre la transformation numérique

livreLe passage d’une année à une autre est souvent l’occasion des bilans. Durant la période des fêtes, L’Usine Digitale nous a proposé une sélection de 12 romans, essais, chroniques, etc. parus en 2015, qui apportent des éclairages particuliers sur la transformation numérique de nos vies.

Vous ne les avez sans doute pas encore tous lus, alors voilà la liste de ces ouvrages avec, pour chacun, un lien vers l’article qui le présente succinctement :

  • L’âge du faire : le sociologue Michel Lallement nous emmène à la rencontre des makers, et s’intéresse à cette nouvelle façon de produire, loin du schéma de l’entreprise classique.
  • La déconnexion des élites : la journaliste Laure Belot mesure la nouvelle fracture numérique existant entre les élites politiques, intellectuelles et économiques et le reste de la société, et en évalue les conséquences.
  • A qui profite le clic ? : dans cet essai, les juristes Valérie-Laure Benabou et Judith Rochfeld s’interrogent sur les questions de la propriété intellectuelle et du partage de la valeur à l’ère de la création numérique.
  • A quoi rêvent les algorithmes ? : le sociologue Dominique Cardon nous livre sa réflexion sur le pouvoir croissant des algorithmes et, au-delà de la seule technique, les questions morales, sociales et politiques qu’ils soulèvent.
  • On m’avait dit que c’était impossible : Jean-Baptiste Rudelle, fondateur de Criteo, le spécialiste français du reciblage publicitaire, nous raconte l’épopée de sa société, qui séduit désormais des annonceurs du monde entier.
  • La France du bon coin : pour rédiger ce rapport, le consultant David Ménascé est allé à la rencontre de ces gens, de plus en plus nombreux, qui, après leur journée de travail, deviennent des micro-entrepreneurs dans le cadre de l’économie collaborative.
  • Les développeurs : le chercheur Paris Chrysos s’intéresse à ces pièces maîtresses de la transformation digitale qui, surfant entre tâches rémunérées et bénévolat, inventent un nouveau rapport au travail.
  • Bienvenue dans le capitalisme 3.0 : les journalistes Sandrine Cassini et Philippe Escande livrent une synthèse des enjeux posés par la révolution digitale actuellement en cours.
  • L’âge de la multitude (2e édition) : cette 2ème édition du classique d’Henri Verdier et Nicolas Colin est l’occasion de (re)découvrir comment les milliards d’individus qui forment la « multitude » sont devenus la clé du succès des organisations post-révolution numérique.
  • Bovary 21 : dans ce roman contant l’histoire d’une madame Bovary des temps ultramodernes, Georges Lewi critique les abus du monde du marketing et la manipulation liée aux réseaux sociaux.
  • Le monde est clos et le désir infini : nous faisant voyager au cœur des mécanismes qui ont fait advenir la société moderne, l’économiste Daniel Cohen explique pourquoi l’humanité aspire intensément à une croissance de plus en plus fugitive.
  • La gouvernance par les nombres : le juriste Alain Supiot nous montre comment les nombres qui structurent notre vision du monde ont soumis les lois à un « calcul d’utilité », faisant en sorte qu’elles servent des « harmonies économiques ».

Bonne lecture !

Les opérateurs télécoms réclament un électrochoc dans le numérique

« Il faut un Digital Act à la française! » La Fédération française des télécoms alerte sur un risque de décrochage de la France et de l’Europe, seul continent qui connaît une baisse de revenus dans le numérique, selon une étude de Arthur D. Little pour la fédération, qui regroupe Orange, Numéricable-SFR et Bouygues Télécom. La FFTelecoms réclame une politique un peu moins favorable à la demande pour soutenir l’offre.

Source : Les opérateurs télécoms réclament un électrochoc dans le numérique

Aurélien Duthoit, Michael Porter à l’ère numérique : la mise à jour 2.0 –

Source : Aurélien Duthoit, Michael Porter à l’ère numérique : la mise à jour 2.0 – Precepta stratégiques – xerfi-precepta-strategiques-tv.com

Ce vendredi, Xerfi Canal nous propose un numéro spécial « stratégies dans l’économie numériques » qui éclaire le sujet sous différents angles (cette vidéo n’en est qu’un exemple), pour mieux comprendre ce que peut ou ne peut pas faire le numérique.

A visionner sans modération !

Podcast d’été : Homo numéricus

Il est de tradition de proposer des « lectures de vacances »… mais à l’ère numérique, un « podcast de vacances » est aussi indiqué, non ?

Cet été, Nicolas Demorand vous propose, chaque dimanche à 13h20, l’émission « Homo numéricus », qui fait le point sur différents enjeux de la numérisation avec d’intéressants invités. Il a démarré avec Dominique Cardon, que nous connaissons bien :

Vous pouvez retrouver toutes les archives sur le site de France Inter, ou vous abonner au podcast via iTunes ou via RSS.

Bonne écoute !