Pour Google, c’est un coup dur. Après près de cinq ans d’enquête sur un éventuel abus de position dominante sur la recherche en ligne, la Commission européenne a finalement décidé, mercredi 15 avril, d’envoyer au groupe internet américain ce que l’on appelle dans le jargon bruxellois une « communication de griefs », c’est-à-dire un acte d’accusation en bonne et due forme. L’annonce devait être faite par la commissaire à la concurrence, la Danoise Margrethe Vestager, en charge du dossier depuis sa prise de fonction, en novembre 2014.
La domination de Google en Europe est écrasante (80% des recherches en ligne) et le géant américain a pour le moment toujours réussi à contourner les règles européennes, qu’il s’agisse de concurrence, de respect des données privées, ou encore de fiscalité. Jusqu’à présent, la Commission ne l’avait jamais attaqué frontalement, agissant plutôt sur le mode anglo-saxon de la négociation, sans véritable mesure coercitive.
De l’avis des acteurs européens de l’internet et des télécoms, il est temps que cela cesse : Google en effet, dans une large mesure, cueille les fruits de la croissance du net sans contribuer, loin s’en faut, à la hauteur de ce qu’il récolte. Pis, sa position dominante lui permet d’étouffer dans l’œuf les initiatives concurrentes qui tenteraient d’émerger et d’écorner son leadership. C’est ce dernier volet qui fait réagir la Commission… toujours plus vigoureuse à défendre la soi-disant « concurrence pure et parfaite » qui n’existe que dans l’imagination des idéologues que les autres aspects d’une régulation qu’on pourrait qualifier de « citoyenne ».
On attend aussi avec impatience que Google, mais aussi d’autres géants des services sans réseaux (Apple, Amazon, Facebook et consorts), soient mis au pas sur leurs pratiques d’évasion fiscale, leurs entorses à la protection des données personnelles au regard du droit européen, mais aussi mis à contribution pour participer à l’investissement dans les réseaux dont ils profitent. C’est un peu trop facile d’arriver au moment de la moisson, sans avoir participé ni au labour, ni à l’ensemencement des terres !