Travail et numérique : aux Etats-Unis, on laisse l’innovation se développer avant de légiférer

Vendredi dernier s’est tenue à Paris, au siège de l’OCDE, une rencontre des ministres du Travail des pays membres. Chercheurs, syndicalistes et politiques ont esquissé leur vision de l’avenir du travail à l’heure de la mondialisation et de la numérisation.

thomas perez

A cette occasion, le Secrétaire d’état au Travail des Etats-Unis, Thomas Perez a accepté de répondre aux questions de L’Usine Digitale, explicitant notamment l’attitude libérale adoptée Outre-Atlantique face à la transformation du travail sous l’effet du numérique. Selon lui, l’important est de laisser l’innovation technologique se développer et de « s’en emparer à bras le corps », avant de légiférer sur la protection des travailleurs pour rendre l’innovation « inclusive ».

Top chrono pour une interview à l’américaine, en dix minutes et entre deux portes

Des millions d’emplois menacés par la « quatrième révolution industrielle »

Le rapport sur le futur de l’emploi (à consulter en version complète ou en résumé) publié hier par le World Economic Forum (WEF), à l’occasion de l’édition 2016 du Forum de Davos qui s’ouvre demain, n’est pas très réjouissant. Il s’appuie sur une étude menée dans les 15 premières économies mondiales, pays ou groupements de pays qui totalisent environ 65 % de la main d’œuvre mondiale. Ce rapport nous annonce que la « quatrième révolution industrielle » (autour de technologies émergentes comme le cloud computing, le Big Data, l’Internet des Objets, la robotique, l’intelligence artificielle, etc.) va provoquer la disparition de plus de 5 millions de postes dans le monde d’ici à 2020.

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En effet, les quelques 2 millions de postes créés dans des domaines spécifiques tels que l’informatique, les mathématiques et l’ingénierie, ne suffiront pas à compenser les 7 millions d’emplois perdus « en raison des sureffectifs, de l’automatisation et de la désintermédiation ». Le rapport du WEF détaille secteur par secteur et pays par pays l’impact d’une révolution qui affectera tout particulièrement les travailleurs en « col blanc » et le personnel administratif. Par ailleurs, la main d’œuvre féminine sera relativement plus pénalisée : seulement 48% des 7 millions d’emplois menacés sont actuellement occupés par des femmes, mais leur moindre proportion dans le marché global du travail et leur sous-représentation dans les secteurs appelés à croître maximisent l’impact de cette évolution sur leur activité.

Au-delà d’une automatisation dont l’impact sur l’emploi reste encore limité dans la majorité des secteurs, c’est le changement de nature du travail qui devrait le plus contribuer à ces pertes d’emplois. En rendant le travail possible de n’importe où et n’importe quand, les nouvelles technologies favorisent la fragmentation des tâches par les entreprises. En découle une nouvelle « économie des petits boulots » (« gig economy »), dans laquelle un travail jadis confié à un salarié est désormais proposé, via des plateformes numériques, à une multitude de travailleurs indépendants. La première grande substitution à venir ne serait donc pas celle du travailleur humain par les robots, mais celle du salarié par les « freelancers », provoquant ainsi la « désintermédiation » évoquée par le rapport WEF.

Source : Emploi : la peur de la grande substitution – Les Echos

L’inscription à Pôle Emploi passe désormais obligatoirement par Internet

A partir du 1er mars, toutes les demandes d’inscription à Pôle Emploi devront se faire en ligne. Cette procédure, testée dans plusieurs régions depuis octobre 2015, est désormais étendue à l’ensemble de la France.

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Comme le résume un des commentaires de l’article de Clubic, « la possibilité de le faire par internet, c’est cool, l’obligation, beaucoup moins ». Surtout si l’on considère que les 18% de Français qui ne disposent pas d’une connexion Internet à domicile figurent généralement parmi les populations les plus « fragiles », comme le montre l’édition 2015 du Baromètre du numérique du CREDOC (pages 41 à 44) : majoritairement plutôt âgés (mais environ 10% de non-internautes sont encore en âge de travailler), seuls, peu ou pas diplômés et disposant d’un faible niveau de revenus.
Toutefois, le décret pense à ces derniers en prévoyant qu’« à défaut de parvenir à s’inscrire lui-même par voie électronique, le travailleur recherchant un emploi peut procéder à cette inscription dans les services de Pôle emploi, également par voie électronique, et bénéficier le cas échéant de l’assistance du personnel de Pôle emploi ».

Les leaders mondiaux sont aussi sur Facebook

Près de 90 % des leaders et gouvernements des 193 pays inscrits à l’ONU ont désormais un profil sur le célèbre réseau social, affirme une étude de Burson-Marsteller.

Source : Les leaders mondiaux sont aussi sur Facebook, Médias – Les Echos

La question est : est-ce que ce sont vraiment eux qui publient, ou leurs équipes ? Si oui, tant mieux : ça crée des emplois 🙂

La Banque mondiale dénonce l’inégale répartition des « dividendes du numérique »

Dans son récent rapport sur « Les dividendes du numérique », l’agence spécialisée de l’ONU constate que près de 60% de la population mondiale n’a toujours pas accès à Internet, ce ratio passant à 85% si l’on ne considère que l’Internet haut débit. La fracture est moins visible avec la téléphonie mobile, mais au final ce sont les pays riches qui profitent de la majeure partie des retombées économiques liées au développement numérique.

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Accédez à la version courte du rapport de la Banque mondiale, énonçant les messages principaux, ou à la version intégrale.

Inégalités radicales sur la planète

Les 62 personnes les plus riches au monde possèdent désormais autant que la moitié de la population mondiale, soit quelque 3,5 milliards de personnes, déclare l’ONG Oxfam dans un rapport rendu public lundi. La richesse de ces 62 individus, dont 53 hommes, a augmenté de 44 % depuis 2010, alors que celle des 3,5 milliards de personnes les plus pauvres chutait de 41 %, précise Oxfam dans cette étude, publiée à deux jours de l’ouverture du Forum économique mondial de Davos.

Un rapport (en anglais) relayé par la newsletter du Monde ce jour. Un peu en marge de nos préoccupations « télécoms »… mais fort utile pour comprendre le monde dans lequel nous vivons.

Et si c’était le numérique qui freinait nos économies…

L’innovation numérique marque-t-elle le pas ? C’est la question qu’ont voulu poser l’Institut G9+, think tank sur le numérique, et l’IDATE, lors d’un colloque organisé le 1er décembre 2015 sur le thème « Les Paradoxes de l’Innovation Numérique : digital innovation versus digital innovation ? ». Décryptage des interventions à partir du compte rendu.

Source : Et si c’était le numérique qui freinait nos économies…

L’article mériterait d’être un peu plus approfondi, mais le questionnement est intéressant…

12 livres en 12 mois pour comprendre la transformation numérique

livreLe passage d’une année à une autre est souvent l’occasion des bilans. Durant la période des fêtes, L’Usine Digitale nous a proposé une sélection de 12 romans, essais, chroniques, etc. parus en 2015, qui apportent des éclairages particuliers sur la transformation numérique de nos vies.

Vous ne les avez sans doute pas encore tous lus, alors voilà la liste de ces ouvrages avec, pour chacun, un lien vers l’article qui le présente succinctement :

  • L’âge du faire : le sociologue Michel Lallement nous emmène à la rencontre des makers, et s’intéresse à cette nouvelle façon de produire, loin du schéma de l’entreprise classique.
  • La déconnexion des élites : la journaliste Laure Belot mesure la nouvelle fracture numérique existant entre les élites politiques, intellectuelles et économiques et le reste de la société, et en évalue les conséquences.
  • A qui profite le clic ? : dans cet essai, les juristes Valérie-Laure Benabou et Judith Rochfeld s’interrogent sur les questions de la propriété intellectuelle et du partage de la valeur à l’ère de la création numérique.
  • A quoi rêvent les algorithmes ? : le sociologue Dominique Cardon nous livre sa réflexion sur le pouvoir croissant des algorithmes et, au-delà de la seule technique, les questions morales, sociales et politiques qu’ils soulèvent.
  • On m’avait dit que c’était impossible : Jean-Baptiste Rudelle, fondateur de Criteo, le spécialiste français du reciblage publicitaire, nous raconte l’épopée de sa société, qui séduit désormais des annonceurs du monde entier.
  • La France du bon coin : pour rédiger ce rapport, le consultant David Ménascé est allé à la rencontre de ces gens, de plus en plus nombreux, qui, après leur journée de travail, deviennent des micro-entrepreneurs dans le cadre de l’économie collaborative.
  • Les développeurs : le chercheur Paris Chrysos s’intéresse à ces pièces maîtresses de la transformation digitale qui, surfant entre tâches rémunérées et bénévolat, inventent un nouveau rapport au travail.
  • Bienvenue dans le capitalisme 3.0 : les journalistes Sandrine Cassini et Philippe Escande livrent une synthèse des enjeux posés par la révolution digitale actuellement en cours.
  • L’âge de la multitude (2e édition) : cette 2ème édition du classique d’Henri Verdier et Nicolas Colin est l’occasion de (re)découvrir comment les milliards d’individus qui forment la « multitude » sont devenus la clé du succès des organisations post-révolution numérique.
  • Bovary 21 : dans ce roman contant l’histoire d’une madame Bovary des temps ultramodernes, Georges Lewi critique les abus du monde du marketing et la manipulation liée aux réseaux sociaux.
  • Le monde est clos et le désir infini : nous faisant voyager au cœur des mécanismes qui ont fait advenir la société moderne, l’économiste Daniel Cohen explique pourquoi l’humanité aspire intensément à une croissance de plus en plus fugitive.
  • La gouvernance par les nombres : le juriste Alain Supiot nous montre comment les nombres qui structurent notre vision du monde ont soumis les lois à un « calcul d’utilité », faisant en sorte qu’elles servent des « harmonies économiques ».

Bonne lecture !

L’accord sur le commerce des services (TISA) : l’autre traité que l’Union européenne négocie en secret avec les Etats-Unis / France Inter

Source : L’accord sur le commerce des services (TISA) : l’autre traité que l’Union européenne négocie en secret avec les Etats-Unis / France Inter

Avec :

  • Viviane Reding – Ancienne commissaire européenne, et députée PPE.
    Yannick Jadot – Député EELV, et vice-président de la commission du commerce international.
    Patrick Le Hyaric – Député européen de la Gauche Unitaire Européenne.

A réécouter ici  :

A lire aussi sur le blog Les Décodeurs du Monde : TiSA : un accord géant de libre-échange en discrètes négociations

Tous en 4G, tous surveillés ?

Dans le cadre du plan « Essentiels 2020 », les personnels d’Orange SA sont désormais équipés d’un mobile 4G. « Tous en 4G » permet à chacun de disposer d’un outil professionnel de dernière génération et de développer son expertise d’usage des outils numériques. Mais ce nouvel outil conduit à une fusion des usages pro et perso du mobile, qui comporte de nombreux risques pour les personnels. Manque de maîtrise du sujet par la Direction ou déloyauté délibérée ?

Source : CFE-CGC groupe Orange | Tous en 4G, tous surveillés ? | Conditions de Travail et Santé

Un tract dont l’analyse peut être utile à tous les salariés confrontés à l’utilisation des outils de communication fournis par leur employeur…

Avec Valérie Peugeot du Labo de l’ESS / France Inter

Source : Avec Valérie Peugeot du Labo de l’ESS / France Inter

Un décryptage des « communs », très intéressant pour comprendre mieux ces notions parfois un peu difficiles à saisir… souvent pour des raisons de vocabulaire : Valérie Peugeot met des exemples concrets sous ces mots dont le sens nous échappe, pour mieux accompagner notre réflexion sur une question dont il est fondamental de se saisir en tant que citoyen.

Vous ne voyez pas le rapport entre les affouages et le logiciel libre ? Pour écouter… y’a qu’à cliquer 🙂

Sécurité : l’inquiétante dérive vers la surveillance de masse

En plus de la révision constitutionnelle, le gouvernement prévoit un nouveau texte de loi pour étendre grandement les prérogatives du parquet et de la police en temps ordinaire. Un pas de plus vers la surveillance généralisée sous couvert de lutte contre le terrorisme ?

Source : Sécurité : l’inquiétante dérive vers la surveillance de masse

Uber France condamnée en appel pour « pratique commerciale trompeuse »

L’offre payante de transport de personne UberPop avait été suspendue en juillet à l’issue d’un bras de fer entre la filiale française du géant américain et le gouvernement.

Source : Uber France condamnée en appel pour « pratique commerciale trompeuse »