Travailler 37 heures sans compensation diminuerait le coût du travail de 3%

C’est, en tout cas, le calcul fait par le sénateur Albéric de Montgolfier (Les Républicains) dans son rapport, réalisé au nom de la commission des finances du Sénat, concernant les enjeux du temps de travail pour la compétitivité, l’emploi et les finances publiques.

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Dressant d’abord un bilan de la réduction du temps de travail issue des lois Aubry, il estime que les bons résultats enregistrés (création ou la préservation d’environ 350 000 emplois entre 1998 et 2002) proviennent « essentiellement des allègements généraux de charges et de la flexibilité accrue de l’organisation du travail », et que « la baisse de la durée légale de 39 à 35 heures a eu, au mieux, un impact très marginal ». Reprenant l’argument développé par tous les détracteurs des 35 heures, il affirme qu’à moyen terme, cette mesure a pesé sur la compétitivité des entreprises françaises. Et c’est très logiquement qu’il en conclut que faire évoluer les règles relatives au temps de travail – sa durée légale et/ou la majoration des heures supplémentaires – constituerait « un levier important de renforcement de la compétitivité des entreprises » et du « potentiel de croissance » du pays.

Pour cela, quatre scenarii sont envisagés, le premier autour de l’augmentation de la durée du temps de travail sans compensation salariale, les trois autres autour de la diminution voire de la suppression de la majoration des heures supplémentaires :

  • Une augmentation de 2 heures par semaine de la durée légale du travail, qui passerait alors à 37 heures, sans compensation salariale, engendrerait « une baisse du coût du travail de 3 %, en tenant compte des montants « économisés » sur les heures supplémentaires, soit environ 1,6 milliards d’euros » et permettrait « la création de 40 000 à 400 000 emplois ». C’est la solution préconisée par le rapport ;
  • Avec la suppression de la majoration des heures supplémentaires, « le coût du travail serait globalement minoré de 0,4 % » ;
  • Un report du seuil de déclenchement des heures supplémentaires de 35 à 36 heures occasionnerait « une baisse du coût du travail de 0,2 %» ;
  • Quant à la diminution de la majoration des heures supplémentaires, elle engendrerait une « baisse du coût du travail de 0,02 % » par point de majoration enlevé.

Prenant fait et cause pour la solution d’augmentation de la durée légale du travail, le rapport déplore l’« effet marginal » résultant d’une diminution de la majoration des heures supplémentaires, regrettant qu’elle soit, pour l’instant, la principale mesure envisagée.

A quelques semaines de la présentation en Conseil des Ministres du projet de loi sur le réaménagement des règles relatives au temps de travail, voilà un coup de pression supplémentaire mis sur le gouvernement .

La France indemnise-t-elle mieux les chômeurs que ses voisins ?

La comparaison des régimes européens d’assurance chômage est un exercice délicat, tant les règles varient d’un pays à l’autre.

Source : La France indemnise-t-elle mieux les chômeurs que ses voisins ?

Les décryptages des « Décodeurs » sont toujours très intéressants. Et comme dirait l’autre, un peu de social, ça peut pas faire de mal…

En opposant entrepreneurs et salariés, Emmanuel Macron déclenche la polémique

La vie d’un entrepreneur, elle est bien souvent plus dure que celle d’un salarié. Il ne faut jamais l’oublier.

emmanuel macron

Certes, la phrase, volontiers provocatrice, prononcée par le Ministre de l’Economie Emmanuel Macron au micro de BFMTV-RMC portait surtout sur les risques inhérents au lancement d’une entreprise (« (L’entrepreneur) peut tout perdre, lui, et il a moins de garanties »). Mais elle n’a pas manqué d’enflammer la presse et les réseaux sociaux, pour abonder dans le sens du ministre ou au contraire fustiger sa sortie. Le Monde est allé plus loin avec un article sont annalysées, statistiques de l’INSEE à l’appui, les situations des deux catégories à travers différents critères.

Mais peut-on vraiment trancher sur cette question, tant les différences sont nombreuses et criantes, non seulement entre entrepreneurs et salariés, mais aussi à l’intérieur de ces catégories. Un monde sépare en effet l’auto-entrepreneur et le dirigeant de SARL d’une part, le cadre et l’ouvrier d’autre part… Au-delà de ces considérations, il paraît, quoi qu’il en soit, assez peu sain d’opposer deux catégories de travailleurs partageant une même préoccupation d’exercer leur activité dans des conditions décentes et, si possible, épanouissantes.

Des millions d’emplois menacés par la « quatrième révolution industrielle »

Le rapport sur le futur de l’emploi (à consulter en version complète ou en résumé) publié hier par le World Economic Forum (WEF), à l’occasion de l’édition 2016 du Forum de Davos qui s’ouvre demain, n’est pas très réjouissant. Il s’appuie sur une étude menée dans les 15 premières économies mondiales, pays ou groupements de pays qui totalisent environ 65 % de la main d’œuvre mondiale. Ce rapport nous annonce que la « quatrième révolution industrielle » (autour de technologies émergentes comme le cloud computing, le Big Data, l’Internet des Objets, la robotique, l’intelligence artificielle, etc.) va provoquer la disparition de plus de 5 millions de postes dans le monde d’ici à 2020.

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En effet, les quelques 2 millions de postes créés dans des domaines spécifiques tels que l’informatique, les mathématiques et l’ingénierie, ne suffiront pas à compenser les 7 millions d’emplois perdus « en raison des sureffectifs, de l’automatisation et de la désintermédiation ». Le rapport du WEF détaille secteur par secteur et pays par pays l’impact d’une révolution qui affectera tout particulièrement les travailleurs en « col blanc » et le personnel administratif. Par ailleurs, la main d’œuvre féminine sera relativement plus pénalisée : seulement 48% des 7 millions d’emplois menacés sont actuellement occupés par des femmes, mais leur moindre proportion dans le marché global du travail et leur sous-représentation dans les secteurs appelés à croître maximisent l’impact de cette évolution sur leur activité.

Au-delà d’une automatisation dont l’impact sur l’emploi reste encore limité dans la majorité des secteurs, c’est le changement de nature du travail qui devrait le plus contribuer à ces pertes d’emplois. En rendant le travail possible de n’importe où et n’importe quand, les nouvelles technologies favorisent la fragmentation des tâches par les entreprises. En découle une nouvelle « économie des petits boulots » (« gig economy »), dans laquelle un travail jadis confié à un salarié est désormais proposé, via des plateformes numériques, à une multitude de travailleurs indépendants. La première grande substitution à venir ne serait donc pas celle du travailleur humain par les robots, mais celle du salarié par les « freelancers », provoquant ainsi la « désintermédiation » évoquée par le rapport WEF.

Source : Emploi : la peur de la grande substitution – Les Echos

La Banque mondiale dénonce l’inégale répartition des « dividendes du numérique »

Dans son récent rapport sur « Les dividendes du numérique », l’agence spécialisée de l’ONU constate que près de 60% de la population mondiale n’a toujours pas accès à Internet, ce ratio passant à 85% si l’on ne considère que l’Internet haut débit. La fracture est moins visible avec la téléphonie mobile, mais au final ce sont les pays riches qui profitent de la majeure partie des retombées économiques liées au développement numérique.

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Accédez à la version courte du rapport de la Banque mondiale, énonçant les messages principaux, ou à la version intégrale.

Inégalités radicales sur la planète

Les 62 personnes les plus riches au monde possèdent désormais autant que la moitié de la population mondiale, soit quelque 3,5 milliards de personnes, déclare l’ONG Oxfam dans un rapport rendu public lundi. La richesse de ces 62 individus, dont 53 hommes, a augmenté de 44 % depuis 2010, alors que celle des 3,5 milliards de personnes les plus pauvres chutait de 41 %, précise Oxfam dans cette étude, publiée à deux jours de l’ouverture du Forum économique mondial de Davos.

Un rapport (en anglais) relayé par la newsletter du Monde ce jour. Un peu en marge de nos préoccupations « télécoms »… mais fort utile pour comprendre le monde dans lequel nous vivons.

Investissements : les opérateurs mobiles européens se font distancer par leurs homologues américains et asiatiques

Lors de notre dernière actualisation des graphiques relatifs aux indicateurs clefs des opérateurs de télécommunications en France, nous avions souligné la chute des investissements des opérateurs qui, en 2014, ont atteint leur plus bas niveau depuis 4 ans.

Dévoilée en fin d’année 2015 par la Fédération Française des Télécoms (FFT), une étude de l’Idate élargit cette tendance aux principaux pays de l’Union Européenne, dans lesquels le niveau d’investissement des opérateurs se situe très en deçà de celui des Etats-Unis et des principaux pays développés d’Asie. L’écart s’est même creusé depuis quelques années comme en atteste le graphique ci-dessous qui montre l’évolution des CAPEX moyens par habitant dans ces différentes zones géographiques : celui des opérateurs mobiles américains est désormais 2 fois supérieur à celui des 5 principaux pays européens.

capex_moyen_par_habitantEn cause, la chute des revenus subie par les opérateurs européens, dont les prix de détail ont drastiquement baissé sur les dernières années, sous l’effet des batailles concurrentielles et/ou de la pression régulation. A l’inverse, sur un marché américain qui n’est pas confronté aux mêmes phénomènes, les revenus des opérateurs mobiles continuent à progresser, comme en témoigne le graphique ci-dessous.

revenus« Les opérateurs mobiles européens investissent autant qu’ils le peuvent, mais le recul de leurs revenus les empêche simplement de rester dans la course à l’innovation et l’investissement », estime l’étude de l’Idate. Comme le confirme le graphique ci-dessous, ce sous-investissement a pour conséquence un retard dans le déploiement de la 4G et, partant dans l’usage de la data par les consommateurs. Au final, « ce retard pénalise en réalité les consommateurs pour lesquels les politiques publiques ont sacrifié l’innovation et donc les usages, au bénéfice de prix très bas », comme le conclut la FFT.

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Orange vers une banque 100% mobile avec le concours de Groupama Banque

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Voilà 10 jours qu’Orange et Groupama Banque ont annoncé être entrés en négociations exclusives pour nouer un partenariat, qui devrait déboucher sur l’acquisition par l’opérateur de 65% de la filiale bancaire de l’assureur et aboutir à la création d’une banque 100% mobile, baptisée « Orange Banque ». Le lancement de cette dernière est prévu pour début 2017 en France, avant d’autres marchés européens comme l’Espagne ou la Belgique. Ses services couvriront les activités de banque au quotidien, l’épargne, ainsi que les crédits et l’assurance. 100% mobile, l’offre sera cependant soutenue par le réseau de proximité des 850 boutiques de l’opérateur et par les 3 000 agences des réseaux Groupama et Gan.

Cette opération s’inscrit dans le cadre d’une volonté de diversification des activités d’Orange qui figure parmi les points-clés du plan stratégique Essentiels2020. Au moment de la présenter, Stéphane Richard estime qu’ « Orange bénéficie d’une combinaison d’atouts essentiels et uniques pour réussir le lancement d’une banque innovante 100% mobile : une marque forte incarnant des valeurs clés comme la sécurité et la fiabilité, un solide réseau de distribution, et surtout la confiance de 28 millions de clients. Cette légitimité dans l’univers des services financiers s’est déjà concrétisée avec le succès de Orange Money sur la zone Afrique Moyen-Orient, et plus récemment avec le lancement réussi de Orange Finanse en Pologne ». C’est d’ailleurs en ayant à l’esprit les bons résultats enregistrés par sa filiale bancaire en modèle low-cost lancée en Pologne fin 2014 que le PDG d’Orange affirme : « Si j’osais le mot, je dirais que nous voulons être le Free de la banque en se situant volontairement moins cher que ce qui existe aujourd’hui et aussi transparent sur les conditions de tarification ».

Depuis une semaine, de nombreux articles d’analyse ont été écrits sur le sujet :

Au-delà d’une stratégie qui paraît a priori pertinente, il faut maintenant voir comment cette opération sera mise en œuvre concrètement. Ainsi, le volet emploi de cette opération n’a, semble-t-il, pas vraiment été évoqué pour l’instant. Désormais avertis de l’impact assez désastreux du digital sur les emplois du secteur bancaire (600 000 licenciements au niveau mondial depuis 2008), nous ne manquerons pas de suivre cela de près.

Le Big Data peut-il remplacer les sondages ?

Le Big Data serait capable d’aider la police de Los Angeles à réduire la criminalité. On le dit en mesure de rendre les villes plus intelligentes, et certains voient même en lui une alternative crédible aux politiques contraignantes pour lutter contre les dérèglements climatiques (1). Pourquoi le Big Data, en apparence tout puissant, n’a-t-il pas encore « uberisé » l’industrie du sondage ? Leonardo Noleto, Data Scientist, Guillaume Pataut, mathématicien, et Guilhem Fouetillou, cofondateur de la startup Linkfluence (spécialisée dans l’écoute du web social pour les marques) et professeur associé à Science Po Paris, livrent leur avis sur la question.

Source : Le Big Data peut-il remplacer les sondages ?

Un très bon papier de fond qui remet les idées en place… et donne de quoi continuer la réflexion.

Julien Pillot, Precepta – Les 3 bugs majeurs du big data

Source : Julien Pillot, Precepta – Les 3 bugs majeurs du big data

Et s’il y avait un mirage du big data ? Et si le Big Data ne tenait pas toutes ses promesses, notamment celles avancées par certains cabinets de conseil ? Il faut dire que les modèles centrés sur l’analyse quantitative des données souffrent de nombreuses failles que révélaient encore récemment Gary Marcus et Ernest Davis dans l’article « Eight Problems with Big Data ».

Des remarques finalement de bon sens… mais ce dernier étant trop souvent mis de côté face aux promesses « magiques » des nouvelles technologies auxquelles il est tellement « hype » d’adhérer, ça ne fait pas de mal de les rappeler 🙂

12 livres en 12 mois pour comprendre la transformation numérique

livreLe passage d’une année à une autre est souvent l’occasion des bilans. Durant la période des fêtes, L’Usine Digitale nous a proposé une sélection de 12 romans, essais, chroniques, etc. parus en 2015, qui apportent des éclairages particuliers sur la transformation numérique de nos vies.

Vous ne les avez sans doute pas encore tous lus, alors voilà la liste de ces ouvrages avec, pour chacun, un lien vers l’article qui le présente succinctement :

  • L’âge du faire : le sociologue Michel Lallement nous emmène à la rencontre des makers, et s’intéresse à cette nouvelle façon de produire, loin du schéma de l’entreprise classique.
  • La déconnexion des élites : la journaliste Laure Belot mesure la nouvelle fracture numérique existant entre les élites politiques, intellectuelles et économiques et le reste de la société, et en évalue les conséquences.
  • A qui profite le clic ? : dans cet essai, les juristes Valérie-Laure Benabou et Judith Rochfeld s’interrogent sur les questions de la propriété intellectuelle et du partage de la valeur à l’ère de la création numérique.
  • A quoi rêvent les algorithmes ? : le sociologue Dominique Cardon nous livre sa réflexion sur le pouvoir croissant des algorithmes et, au-delà de la seule technique, les questions morales, sociales et politiques qu’ils soulèvent.
  • On m’avait dit que c’était impossible : Jean-Baptiste Rudelle, fondateur de Criteo, le spécialiste français du reciblage publicitaire, nous raconte l’épopée de sa société, qui séduit désormais des annonceurs du monde entier.
  • La France du bon coin : pour rédiger ce rapport, le consultant David Ménascé est allé à la rencontre de ces gens, de plus en plus nombreux, qui, après leur journée de travail, deviennent des micro-entrepreneurs dans le cadre de l’économie collaborative.
  • Les développeurs : le chercheur Paris Chrysos s’intéresse à ces pièces maîtresses de la transformation digitale qui, surfant entre tâches rémunérées et bénévolat, inventent un nouveau rapport au travail.
  • Bienvenue dans le capitalisme 3.0 : les journalistes Sandrine Cassini et Philippe Escande livrent une synthèse des enjeux posés par la révolution digitale actuellement en cours.
  • L’âge de la multitude (2e édition) : cette 2ème édition du classique d’Henri Verdier et Nicolas Colin est l’occasion de (re)découvrir comment les milliards d’individus qui forment la « multitude » sont devenus la clé du succès des organisations post-révolution numérique.
  • Bovary 21 : dans ce roman contant l’histoire d’une madame Bovary des temps ultramodernes, Georges Lewi critique les abus du monde du marketing et la manipulation liée aux réseaux sociaux.
  • Le monde est clos et le désir infini : nous faisant voyager au cœur des mécanismes qui ont fait advenir la société moderne, l’économiste Daniel Cohen explique pourquoi l’humanité aspire intensément à une croissance de plus en plus fugitive.
  • La gouvernance par les nombres : le juriste Alain Supiot nous montre comment les nombres qui structurent notre vision du monde ont soumis les lois à un « calcul d’utilité », faisant en sorte qu’elles servent des « harmonies économiques ».

Bonne lecture !

Les opérateurs télécoms en 5 graphiques : la chute se poursuit !

Avec un peu de retard, nous actualisons les graphiques qui permettent d’appréhender, de manière synthétique, les indicateurs clefs des opérateurs de télécommunications en France avec les données consolidées de l’année 2014.

Vous pouvez retrouver sur ce blog nos analyses des données 2008, 2010, 2011, 2012 et 2013.

Ces indicateurs proviennent de l’Observatoire des marchés consolidé par l’Arcep, régulateur français des télécoms, les chiffres étant tirés des séries annuelles depuis 1998, dont nous intégrons les actualisations rétroactives dans nos graphiques. Nous les complétons par l’analyse des données présentées par France Télécom-Orange dans son document de référence 2014.

Ils ne concernent que les opérateurs de télécommunications, hors activité des autres acteurs de la filière, et le marché français.

Les revenus des opérateurs atteignent leur plus bas niveau depuis 12 ans

Certes, la baisse de revenus observée par les opérateurs en 2014 (-3,4%) est moins importante que celle de 2013 (-7,3%). Toutefois, les services mobiles (-7%) continuent à tirer le marché vers le bas, alors même que le nombre d’abonnés (+2,5%) et, surtout, le trafic (+7% pour la voix, +2% pour les SMS et +97% pour la data !) ne cessent d’augmenter. De fait, l’étude de l’Arcep sur l’évolution des prix des services mobiles met en lumière une baisse moyenne de 10% en 2014, certes moins importante que celle observée en 2013 (-26%), mais qui continue d’impacter fortement les revenus d’opérateurs engagés dans la spirale du « low-cost » depuis l’arrivée de Free Mobile en 2012. En effet, si l’impact maximal a eu lieu l’année même du lancement de Free Mobile, les renouvellements de contrats qui arrivent à échéance dans les années qui suivent se font systématiquement à des conditions tarifaires en baisse… d’autant plus dans un contexte de morosité économique, alimentée par un chômage de masse qui devient, malheureusement, une constante de notre vie économique.

revenus

Appelé, fin 2014, à commenter ces chiffres et à extrapoler sur leur évolution future, Jean-Ludovic Silicani, alors Président de l’Arcep, pariait sur un accroissement des revenus des opérateurs pour 2015. Pour justifier son optimisme, il estimait que la guerre des prix arrivait à son terme et qu’une « cure d’amaigrissement » du marché avait contribué à son « assainissement ». Hélas, comme toujours, ce sont les emplois du secteur qui ont fait les frais de ce régime forcé, sacrifiés sur l’autel des politiques de rationalisation des coûts des opérateurs. Mais le régulateur n’en a cure, obnubilé par la religion de la concurrence à tout prix.

Les opérateurs poursuivent leur politique de réduction d’effectifs

emplois

De fait, 3000 postes ont été supprimés dans le secteur des télécoms en 2014, soit une baisse des effectifs de 2,5%. De façon logique, la courbe globale du secteur suit de près les fluctuations de l’opérateur historique (qui s’est délesté de 2,6% de ses effectifs contre 2,2% pour ses concurrents), qui représente toujours 82% des effectifs du secteur. Ainsi, les 5000 emplois nets créés entre 2009 et 2012, sous l’effet du « nouveau contrat social » négocié par les organisations syndicales auprès de la direction d’Orange, ont été contrebalancés par… plus de 7000 suppressions de postes en deux ans suite à la fin de cet accord.

emploisOrange

Avec près de 2700 emplois supprimés en 2014, Orange est passé sous la barre symbolique des 100 000 employés en France. La Direction de l’opérateur historique poursuit sa politique de réduction d’effectifs sans plan social, se contentant de s’appuyer sur une pyramide des âges vieillissante : en 2014, les 1600 embauches en CDI n’ont pas compensé les 3600 départs, essentiellement en retraite. Ce mouvement n’est pas près de s’inverser, le Groupe tablant sur le départ à la retraite de 30 000 salariés sur la période 2013-2020, dont une grande partie ne sera pas remplacée : l’objectif affiché est de stabiliser les effectifs autour de 66 000 à l’horizon 2020.

Au final, confronté à la pression d’un marché toujours très concurrentiel, et d’un actionnaire principal (l’État) qui réclame toujours un dividende plus élevé que l’entreprise ne peut le supporter, Orange continue à faire supporter à ses personnels l’essentiel de son effort de rationalisation des coûts, par la baisse des effectifs, mais aussi par la mise en œuvre de mesures d’économie, certes moins « drahistiques » que chez Numericable-SFR, mais qui constituent une pression quotidienne à l’impossible injonction de faire toujours plus avec toujours moins de moyens.

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La situation n’est pas meilleure du côté des opérateurs alternatifs, qui ont vu disparaître un peu plus de 500 emplois en 2014, et aux dernières nouvelles, elle ne devrait pas s’arranger : en juin 2014, Bouygues Télécom annonçait la suppression à venir de 1500 emplois, tandis que le rachat de SFR par Numéricable menacerait à terme entre 1000 et 2000 emplois selon une estimation du Ministère de l’Économie et des Finances.

Les investissements hors achats de licences sont à leur plus bas niveau depuis 4 ans

investissements

Après les achats de licences 4G des années 2011 et 2012, les investissements ont retrouvé un niveau plus « normal » depuis 2013. En 2014, ils ont à peine dépassé la barre des 7 millions d’euros (-2,9% par rapport à 2013), et si on met de côté les rares achats de licences pendant la période, les investissements sont restés en deçà des 7 milliards d’euros, à 6 906 millions d’euros (-3,5%), pour la première fois depuis 2010.

SFR a notablement contribué à cette baisse, en diminuant ses investissements d’infrastructures de 150 millions d’euros, durant la période d’attentisme qui a précédé sa fusion avec Numericable. La politique mise en œuvre par le repreneur risque de ne pas améliorer les choses en 2015… d’autant que tous les opérateurs ont fortement investi dans l’acquisition de nouvelles licences 4G. (Au total, les lauréats devront verser à l’État une redevance fixe de 2 798 976 324 euros. Celle-ci est exigible en quatre quarts entre 2015 et 2018. Ils verseront également une redevance variable égale à 1% du chiffre d’affaires réalisé sur les fréquences concernées. Source : Arcep)

Ces chiffres ne mentionnent pas les dégâts intervenus dans le reste de la filière télécoms

Aucun acteur n’ose plus suivre en détail l’évolution de l’emploi chez l’ensemble des acteurs de la filière des télécoms en France (équipementiers, centres d’appels, réseaux de distribution spécialisés, sous-traitants en génie civil, SSII intervenant directement chez les opérateurs ou dans le domaine des services numériques…).

Les données publiées par la Fédération Française des Télécoms (enquête Arthur D.Little publiée en 2014 et en 2015), qui n’agglomèrent que les 5 premiers acteurs des activités suivantes : opérateurs télécoms, équipementiers réseaux, fabricants de terminaux (qui n’engendrent que très peu d’emplois directs), fournisseurs de contenus et acteurs internet OTT, montrent cependant une très nette baisse de l’emploi :

  • 2012 : 170 000 emplois
  • 2013 : 159 000 emplois
  • 2014 : 156 000 emplois

14 000 emplois perdus en 3 ans sur ce périmètre, dont la moitié chez les opérateurs de réseaux, et sans compter tous les autres sous-traitants du secteur, dont certains ne font plus parler d’eux… ayant purement et simplement disparu du paysage, c’est énorme pour un secteur unanimement reconnu comme l’un des principaux vecteurs de croissance pour l’économie occidentale.

Alors que « l’uberisation » constitue la nouvelle perspective de l’économie numérique (ou portée par le numérique), et sachant quels dégâts elle produit sur la création de valeur et d’emplois stables, il est plus que temps que nos dirigeants se retroussent les manches pour créer les conditions d’une croissance riche en emplois de qualité !

Avec Valérie Peugeot du Labo de l’ESS / France Inter

Source : Avec Valérie Peugeot du Labo de l’ESS / France Inter

Un décryptage des « communs », très intéressant pour comprendre mieux ces notions parfois un peu difficiles à saisir… souvent pour des raisons de vocabulaire : Valérie Peugeot met des exemples concrets sous ces mots dont le sens nous échappe, pour mieux accompagner notre réflexion sur une question dont il est fondamental de se saisir en tant que citoyen.

Vous ne voyez pas le rapport entre les affouages et le logiciel libre ? Pour écouter… y’a qu’à cliquer 🙂

Télécoms : le fragile équilibre du marché français

Après des années de guerre prix, Orange, Numericable-SFR, Free et Bouygues Telecom semblent se focaliser davantage sur la rentabilité et la création de valeur, dans le sillage d’un appétit croissant des consommateurs pour l’Internet à très haut débit. Même si, dans un univers toujours très concurrentiel, de nouvelles passes d’armes restent possibles.

Source : Télécoms : le fragile équilibre du marché français