SFR : le droit à l’emploi sacrifié pour dégager plus de cash

Communiqué intersyndical SFR :
Version pdf : communiqué de presse intersyndical SFR 28 novembre 2012

Lors du Comité Central d’Entreprise du mercredi 28 novembre, la Direction de SFR a remis le Livre II (détaillant le projet de réorganisation et les impacts sur l’emploi) aux représentants du personnel. Ce projet de « réorganisation de SFR en vue de sa mutation d’Opérateur de Télécoms vers celui d’Opérateur Numérique » prévoit la suppression de 1123 emplois !

Pour les organisations syndicales CFDT, CFE-CGC, CGT, SUD et UNSa, ces suppressions de postes et l’atteinte au droit à l’emploi, sont d’autant moins justifiées que SFR reste une des entreprises les plus bénéficiaires du territoire national.

Selon notre constitution, chacun a droit d’obtenir un emploi et surtout de le conserver. Si la liberté d’entreprendre est aussi garantie, c’est à la condition qu’elle ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à l’emploi.

Dans une économie en récession, tolérer que SFR entreprise très profitable, procède à des suppressions de postes constitue une véritable atteinte au « vivre ensemble » garanti par la Constitution.

Afin d’illustrer cette violation grave du droit à l’emploi, l’intersyndicale SFR s’appuie sur des indicateurs financiers de l’entreprise, pour contester la mise en œuvre de ce vaste plan de suppression d’emplois qui condamne au chômage de nombreux salariés.

AINSI :

–         SFR dégage 12 % de marge nette, soit 5 points de plus que la moyenne du CAC 40,

–         SFR affichait en 2011 un Résultat Brut d’Exploitation de 3,8 milliards d’euros distribuant dans le même temps près de 1,5 milliard de dividendes à ses actionnaires,

–         Le Résultat Brut d’Exploitation 2012 devrait se maintenir au-delà des prévisions, autour de 3,2 milliards, garantissant plus d’1 milliard de dividendes, en ligne avec les 14 milliards distribués au cours des 10 dernières années,

–         Les charges de personnel sont inférieures à 7 % du C A,

–         Les économies de personnel du Plan Social annoncé selon toutes les hypothèses seraient d’environ 50 millions d’euros par an.

–         L’impact de ce plan sur la profitabilité de SFR ne dépassera pas 1 %.

Ce n’est pas l’arrivée de Free qui peut justifier le plan d’économie de SFR !

Il est donc inacceptable pour les organisations syndicales, de tolérer que SFR puisse s’afficher comme une entreprise responsable et citoyenne, et que dans le même temps, elle puisse se livrer avec de tels chiffres à ces suppressions de postes.

L’entreprise ne peut se réfugier derrière la notion de volontariat pour édulcorer la violence et l’impact du nombre et des conséquences des suppressions de postes.

Qui peut croire au volontariat, quand l’entreprise a déjà établi son plan de réorganisation avec les suppressions de postes qui l’accompagnent, que feront les salariés sans poste dans la nouvelle organisation ?

Qui peut croire que seront volontaires les salariés dont les postes seront déménagés dans d’autres régions ?

Derrière cette notion de volontariat, l’entreprise commet une véritable atteinte au droit à l’emploi de chacun des salariés dans une entreprise prospère, alors que rien ne justifie l’usage du motif économique.

VIVENDI a déjà annoncé à ses représentants du personnel que son pôle télécom n’était plus un relais de croissance et qu’il cherchait un repreneur. Le pouvoir politique et nous même devrions tolérer que sous la pression d’actionnaires déçus par le cours boursier, les dirigeants de VIVENDI sacrifient des salariés sur l’autel des profits pour faire encore plus briller leur pépite SFR, et mieux la vendre…

L’atteinte au droit à l’emploi est trop profonde pour qu’un tel plan puisse être admis.

Il est hors de question que les salariés, dans une telle configuration économique, perdent leur emploi sur le fondement d’un manque d’anticipation et de stratégie de ses dirigeants, et que l’entreprise soit réorganisée sans qu’un projet industriel fort et sur le long terme ne soit présenté.

Admettre ce plan, c’est accepter la chronique annoncée d’un désastre social, humain, économique et industriel !

Encore une fois la Direction est déloyale puisque nous apprenons via un communiqué de presse SFR, alors même que le Livre II n’avait pas encore été remis aux élus du CCE, que les partenaires sociaux sont convoqués le «3 décembre  pour négocier les conditions d’accompagnement des collaborateurs ».

Téléphonie : le gouvernement saisit l’Autorité de la concurrence

L’Autorité de la concurrence vient d’être saisie par Arnaud Montebourg (Ministre du redressement productif) et par Fleur Pellerin (Ministre déléguée chargée des PME, de l’innovation et de l’économie numérique) pour rendre un avis sur les conditions de mutualisation et d’itinérance sur les réseaux mobiles.

Lire la suite sur Boursier.com.

Voir aussi le communiqué de l’Autorité de la Concurrence, qui détaille les sujets qu’elle va examiner d’ici fin février 2013, après audition des acteurs concernés :

  • poursuite de l’accord d’itinérance Free et Orange : le gouvernement se pose la question de savoir dans quelle mesure Free ne bénéficierait pas d’un modèle de déploiement durablement plus avantageux que ses concurrents.
  • mutualisation ou le recours à l’itinérance dans la bande des 800 MHz pour les zones les moins denses du territoire
  • mutualisation des réseaux entre les opérateurs dans les zones les plus denses du territoire

Vous pouvez également retrouver notre analyse du modèle économique de Free Mobile dans le numéro spécial de notre Lettre de l’épargne et de l’actionnariat salarié. Nous apportons et démontrons notre réponse à la question du gouvernement…

L’économie des télécoms en France : deuxième étude pour la Fédération Française des Télécoms

La Fédération Française des Télécom vient de publier sa seconde étude présentant les chiffres clefs du secteur en France, et quelques comparaisons européennes.

Les Échos en proposent une bonne synthèse :

La Fédération française des télécoms publie une compilation de données sur la filière en France. Elle montre que les prix des communications sont plus bas dans l’Hexagone qu’ailleurs et que la part des opérateurs dans la valeur numérique baisse.

Lire la suite sur le site des Échos

Vous pouvez lire le résumé de la Fédération et consulter l’intégralité des slides de présentation sur le site de la FFT.

Vous pouvez également revoir la présentation de la première étude, telle qu’elle a été présentée par Yves Le Mouël lors de l’Université d’été 2012 de la CFE-CGC/UNSA.

Nous aurons l’occasion de revenir sur ces chiffres, qui démontrent une nouvelle fois comment régulation et fiscalité ont mis en danger un secteur stratégique, porteur d’innovation et de croissance, à cause d’une vision très « court-termiste » et purement financière. Espérons qu’il n’est pas trop tard pour éviter que les opérateurs français se retrouvent en grave difficulté.

Technicolor : « Pas d’offre de reprise » de l’usine d’Angers

Nous relayons le texte du communiqué de l’intersyndicale de Technicolor.

PARIS : Il n’y a eu pas d’offre de reprise pour l’usine de Thomson Angers, filiale du groupe Technicolor, à l’issue de la date limite fixée au 1er octobre par le tribunal de Nanterre.

Celui doit se prononcer sur la liquidation ou pas de l’entreprise qui emploie 351 salariés, le 11 octobre.

« Il n’y a pas eu d’offres de reprise, mais on est pas encore le 11 octobre. C’est la semaine de la dernière chance, si rien n’est fait, cela sera la liquidation », a déclaré à l’AFP Guillaume Trichard, porte-parole de l’intersyndicale (CGT, CFDT, SUD, Unsa, CFE-CGC).

Dernière usine de production en Europe du groupe français de matériel de télécommunications et audiovisuel Thomson Angers a été placé en redressement judiciaire le 1er juin. Elle a perdu un gros contrat de fourniture à France de Télécom de décodeurs.

La date du 1er octobre fixée par le tribunal, « n’est pas rédhibitoire », a souligné Guillaume Trichard.

Mardi, l’intersyndicale a été reçue par la ministre déléguée aux PME, Fleur Pellerin.

« On a demandé à la ministre de recontacter France Télécom, dont l’Etat est actionnaire », a ajouté le syndicaliste qui indique que l’opérateur historique est « le seul donneur d’ordre potentiel » sur ce site.

Le 5 septembre, Fleur Pellerin avait appelé le Groupe Technicolor à faire preuve de responsabilité et d’exemplarité en mettant en place l’accompagnement nécessaire aux projets de reprise.

Technicolor: période d’observation prolongée pour le site d’Angers

 La société Thomson Angers, filiale du groupe électronique français Technicolor, placée en liquidation judiciaire, a vu sa période d’observation prolongée jusqu’au 11 octobre, jeudi par le tribunal de commerce de Nanterre.

[…]

La ministre déléguée aux PME, Fleur Pellerin, en avait appelé mercredi à la responsabilité du groupe Technicolor, après un échange mardi avec son directeur général, Frédéric Rose.
« La ministre a appelé le Groupe Technicolor à faire preuve de responsabilité et d’exemplarité en mettant en place l’accompagnement nécessaire aux projets de reprise afin de permettre, à court terme, le maintien de la période d’observation par le tribunal, et à moyen terme, la montée en charge de ces projets », indique un communiqué.
Fleur Pellerin a également échangé avec Stéphane Richard, PDG du Groupe France Telecom Orange, qui s’est engagé à se mobiliser en tant que donneur d’ordre potentiel sur ce site.
Dernière usine de production en Europe du groupe français de matériel de télécommunications et audiovisuel, le site, qui emploie 351 salariés, a été placé en redressement judiciaire le 1er juin.

La dépêche AFP in extenso sur France24

Pour une équité fiscale numérique

Le sujet est toujours d’actualité, puisque la mission d’expertise nommée sur le sujet par le gouvernement doit rendre ses conclusions à l’automne. Nous vous invitons donc à voir ou a revoir la présentation d’Yves Le Mouël, Directeur Général de la Fédération Française des Télécoms, lors de l’Université d’été de la CFE-CGC/UNSA des 3 et 4 juillet 2012.

Elle s’articule en deux parties :

– la présentation de l’étude réalisée par la Fédération Française des Télécoms sur l’impact des télécoms en France (investissements, emplois, compétitivité économique de la France).
– l’analyse et les préconisations de la Fédération sur la fiscalité qui pèse actuellement sur les opérateurs de télécoms français, et qui mériterait un rééquilibrage.

La Web-TV de la CFE-CGC/UNSA vous proposera bientôt de nouveaux temps forts de son Université d’été 2012, à retrouver sous le tag « Université d’été CFE-CGC/UNSA« .

Les opérateurs télécoms en 5 graphiques : intégration des données 2011

Comme chaque année, nous actualisons les graphiques qui permettent d’appréhender, de manière synthétique, les principaux indicateurs clefs des opérateurs de télécommunications en France. Vous pouvez également retrouver nos analyses des données 2010 et 2008

Ces indicateurs proviennent de l’Observatoire des marchés consolidé par l’Arcep, régulateur français des télécoms, les chiffres étant tirés des séries annuelles depuis 1998, dont nous intégrons les actualisations rétroactives dans nos graphiques.Nous les complétons par l’analyse des données présentées par France Télécom dans son document de référence 2011.

Ils ne concernent que les opérateurs de télécommunications, hors activité des autres acteurs de la filière, et le marché français.

Pour la première fois en 2011,
les revenus globaux des opérateurs baissent

Précisons que les usages et le nombre d’abonnés continuent de croître : la baisse des revenus est donc bien liée à une baisse des prix.  Si jusqu’alors le modèle d’évolution des tarifs était plutôt « plus de services pour la même valeur faciale »‘, on bascule désormais vers « autant ou plus de service pour moins cher ». Le mouvement s’est bien sûr accentué début 2012 avec l’arrivée de Free sur le marché des mobiles.

Cette baisse de valeur n’est pas sans conséquences sur l’emploi, quoiqu’en croient encore certains.

Seul France Télécom alimente une légère croissance des emplois…

S’il a été le plus gros destructeur d’emplois de la filière (52 700 emplois supprimés en 12 ans, à compter de la libéralisation du marché des télécoms), France Télécom est désormais le seul à alimenter la reprise des embauches… sous la pression des organisations syndicales qui les ont négociées dans la cadre du « nouveau contrat social » mis en place par la nouvelle Direction de l’entreprise après la crise sociale et le départ de Didier Lombard, désormais mis en examen suite à la mise en œuvre d’une politique délétère pour les personnels.

Les opérateurs représentent un peu moins de la moitié des emplois du secteur, qui pèse entre 300 et 345 000 emplois au total, lorsqu’on y inclut l’ensemble des emplois induits, chez les équipementiers (équipements de réseaux et terminaux), les sous-traitants (prestations de conseil aux opérateurs, d’assistance clients – call-centers ou interventions chez les clients – , installation et maintenance des réseaux…), et les distributeurs indépendants. (vcir l’étude de la Fédération Française des Télécoms, et celle de Bruno Deffains, économiste). Ces trois dernières années, les équipementiers ont fait des coupes sombres dans leurs effectifs en France et en Europe.

… tandis que les opérateurs alternatifs ont détruit près de 1700 emplois en 2011.

Il est bon au passage de rappeler que les destructions d’emplois ne passent pas forcément par des plans sociaux ou des plans de départs volontaires. Le non remplacement des personnels en fin de contrat pour diverses raisons est aussi une destruction d’emplois, certes moins douloureuse en première approche, mais qui contribue à l’augmentation du chômage en France. Les discours « politiquement corrects » sur le sujet ces dernières années tendent à le faire oublier, alors que nous sommes entrés dans une ère de chômage de masse qui pèse sur l’ensemble de la société française, à la fois sur le plan économique (il faut bien payer les cotisations chômage, et cela pèse sur la compétitivité du travail en France, ou que les familles prennent en charge leurs membres sans emploi, ce qui réduit d’autant leur capacité à consommer par ailleurs), mais également sur le plan sociétal (développement des exclusions et des inégalités, qui génèrent également de l’insécurité).

 Les investissements reprennent, mais parfois en trompe-l’oeil…

Tous les investissements ne sont pas affectés au déploiement de nouveaux réseaux : outre la maintenance des réseaux existants, France Télécom inclut dans ses CAPEX le renouvellement des Livebox de ses clients.

Nos commentaires

Alors que le nouveau gouvernement s’inquiète des nouvelles suppressions d’emplois qui s’annoncent chez les opérateurs de télécommunications, ces quelques rappels permettent de remettre les idées en place quant à l’évolution de ce secteur d’activité, et, nous l’espérons, de repenser la régulation du secteur. Sous l’impulsion d’une idéologie libérale, également poussée par Bruxelles, qui ne jure que par les bénéfices de la concurrence pour le consommateur, l’État et le régulateur ont ces dernières années totalement négligé le volet « emploi », pourtant explicitement mentionné dans le code des Postes et Télécommunications comme sous leur responsabilité conjointe.  Il est plus que temps de revoir la copie, et de se poser la question de manière plus globale.Y compris d’ailleurs au niveau du citoyen-consommateur : vaut-il mieux payer quelques euros de plus chaque mois sur sa facture de téléphone, ou financer des cotisations sociales, non seulement chômage, mais aussi couverture sociale et retraites, tout chômeur constituant en la matière un manque à gagner pour les comptes sociaux de la nation ?

Sortir des visions de court terme et trop individualistes ne pourra qu’être bénéfique, à moyen terme, pour chaque citoyen.

Free : quand l’idéologie de la concurrence dessert l’économie

La tribune de Bruno Deffains, dans Le Cercle Les Échos, rappelle les conclusions de l’étude qu’il a présentée mardi matin 3 juillet à l’Université d’été de la CFE-CGC/UNSA 

La concurrence est une notion ambivalente. Sa face éclairée est économique : un moyen d’améliorer le bien-être social. Sa face obscure est politique, voire idéologique : la concurrence comme fin en soi. Nombre de cas récents de « libéralisation » semblent guidés par une conception de la concurrence idéologique plutôt qu’économique.

Le dernier concerne la téléphonie mobile, puisque l’arrivée du quatrième opérateur résulte d’une décision réglementaire et politique : reformatage de la licence et de son prix notamment pour « forcer » l’entrée d’un acteur désigné a priori. S’ensuit une double rupture en termes de prix et de commercialisation. Ce modèle qualifié de low cost a rencontré une forte adhésion initiale des consommateurs contraignant les opérateurs en place à réagir.
Et des chiffres de perte d’emplois ont été cités sans pour autant être expliqués. L’étude d’impact que nous avons menée quantifie ce choc au niveau de l’emploi « interne » chez les opérateurs, de l’emploi direct auprès des partenaires de 1 er rang (fournisseurs, distributeurs et administration en aval), et enfin l’emploi ainsi induit sur la chaîne des partenaires.

Lire la suite dans Les Échos

Nos commentaires

Quelles que soit les arguties que l’on met en face pour nier la validité de cette étude, il faut malheureusement constater que des suppressions d’emploi sont simultanément annoncées ce même jour par trois opérateurs. Alors que SFR et Bouygues Telecom annoncent des plans de départ volontaires,  Stéphane Richard indiquait pour sa part, lors de la même Université d’été, que France Télécom-Orange ne pourra procéder au remplacement de tous les départs en retraite dans les 3 prochaines années.

Et si, comme le souligne l’Expansion, nous avons ici même alerté depuis plusieurs années déjà sur la tendance baissière de l’emploi chez les opérateurs, nous restons plus que dubitatifs sur l’opportunité d’introduire un quatrième opérateur mobile sur le marché français au moment où, dans les principaux pays européens,  le marché se restructurait, pour revenir justement  à ce que le marché peut réalistement accueillir dans des conditions économiques viables, c’est à dire … 3 opérateurs mobiles par pays.

Plusieurs dizaines de milliers d’emplois ayant été détruits alors que le secteur était en croissance (en CA global des opérateurs), il ne fallait pas être grand clerc pour prévoir que l’introduction d’une offre plus agressive sur le plan tarifaire ferait des dégâts plus importants encore. La valeur détruite ne se retrouvera pas de sitôt, si elle se retrouve un jour, et cette pression supplémentaire sur les marges obère en outre les capacités d’investissement dans les nouveaux réseaux, qui pouvaient encore constituer une voie de sortie par le haut, car, d’autres études le démontrent, l’innovation dans les télécommunications est bénéfique pour l’ensemble de l’économie, nous aurons l’occasion d’y revenir.

Le sempiternel rappel d’anciennes ententes tarifaires, si elles sont en effet condamnables, ne peuvent suffire à justifier la véritable « purge » aujourd’hui infligée au secteur des télécoms dans son entier. Rappelons que les amendes ont été payées, que, comme les individus, les entreprises ont le droit d’être réhabilitées lorsqu’elles ont purgé leur peine, et surtout que la défense des emplois n’est pas une simple défense d’intérêt corporatistes, mais une véritable urgence nationale, alors que la crise économique se durcit dans toute l’Europe, et que le chemin de sortie ne s’annonce pas particulièrement simple à trouver. Vaut-il mieux financer des cotisations chômage… ou payer quelques euros de plus sur sa facture de téléphone ?

Il est temps de sortir des contestations purement idéologiques, et de se retrousser les manches pour tenter d’endiguer l’hémorragie des emplois, que personne ne saurait aujourd’hui nier ! C’est ce à quoi nous appelons tous les acteurs, à commencer par ceux qui ont un pouvoir de régulation…

Les débats de l‘Université d’été de la CFE-CGC/UNSA se poursuivent le 4 juillet, pour continuer d’éclairer le contexte, et d’identifier des voies possibles pour sortir de la crise.

La Commission contre l’Europe ?

Alternatives Économiques nous a ouvert ses colonnes pour une tribune qui reprend les propos que nous avions publié en communiqué de presse, et que nous reprenons ici in extenso.

Cinq opérateurs téléphoniques – France Télécom, Deutsche Telekom, Telecom Italia, Telefonica et Vodafone – se réunissent régulièrement (sous le nom d’Euro 5) pour réfléchir à la normalisation technique des réseaux mobiles de 4e génération (4G). Le commissaire européen à la Concurrence, Joaquin Almunia, s’est mis en tête que ces réunions constituaient les prémices d’un cartel. L’établissement de normes communes est pourtant absolument indispensable au bon fonctionnement des télécoms : ceux qui ont eu la mauvaise surprise de ne pas pouvoir utiliser leur téléphone portable aux Etats-Unis en raison de normes différentes outre-Atlantique en savent quelque chose.

De plus, tous les analystes et chercheurs s’accordent pour constater que, dans le domaine des réseaux, la coopération entre opérateurs et équipementiers en vue de définir des normes communes est un élément clé pour innover et s’implanter sur les marchés mondialisés. Dans le passé, les acteurs européens de la téléphonie mobile avaient réussi, en se regroupant, à mettre en place un standard commun – le GSM, puis le 3 GSM – qui a conquis le marché mondial : en 2007, 85 % des abonnés dans le monde utilisaient un téléphone basé sur ce standard et Nokia était encore leader mondial des terminaux mobiles.

Curieusement, la Commission européenne, jusqu’alors favorable à ces comités de normalisation, a fait volte-face. Elle enquête donc sur ces réunions de l’Euro 5, alors même que celles-ci se tiennent en présence d’un avocat et font l’objet de comptes rendus complets à la Commission européenne ! Elle a aussi adressé un questionnaire à la GSMA (évolution du groupement GSM), qui réunit aujourd’hui 800 opérateurs mobiles mondiaux et plus de 200 autres industriels du secteur, fabricants de terminaux, équipementiers, fournisseurs de logiciels et de services, afin de définir des normes pour les réseaux mobiles de quatrième génération.

Ces dernières années, la concurrence  » pure et parfaite  » est devenue l’obsession de la Commission européenne. Cette action est supposée faire baisser les tarifs et profiter ainsi aux consommateurs. Mais ceux-ci seront bientôt virtuels si le chômage continue ses ravages en Europe.

Quel est en effet le résultat de cette obsession concurrentielle dans le domaine des télécoms ? La liquidation de Siemens, Nokia, Ericsson et Alcatel au profit des constructeurs chinois. 32 000 emplois perdus en France chez les opérateurs télécoms depuis 1998, auxquels il faudra ajouter 10 000 délocalisations probables suite à l’arrivée de Free Mobile sur le marché français, toujours au nom de la sacro-sainte concurrence. Tandis que les acteurs américains, tels Google ou Facebook, font désormais la course en tête dans les services de télécommunications. Nous serions pourtant en droit d’attendre de Bruxelles qu’elle défende l’industrie européenne des télécommunications, un secteur stratégique pour nos économies. Mais sa forte croissance à l’échelle mondiale ne profite pour l’instant ni aux entreprises ni aux emplois sur le Vieux Continent.

Depuis, nous avons découvert que l’enquête mandatée par la Commission à été demandée par Apple et Google, comme nous l’avons noté dans cet article de Marianne sur la gestion de la liquidation de Nortel.

Le Commissaire européen à la concurrence veut-il tuer les opérateurs européens ?

La Commission européenne vient de s’illustrer par l’ineptie de son action. Elle démontre une nouvelle fois sa méconnaissance des nouvelles technologies… voire des écosystèmes industriels dans leur ensemble !

Le Commissaire à la concurrence, Joaquin Almunia, s’est en effet mis en tête que 5 opérateurs – France Télécom, Deutsche Telekom, Telecom Italia, Telefonica et Vodafone – se réunissant pour réfléchir à la normalisation technique, débouchait forcément sur une entente ![1]

Questionnaire aux opérateurs et à la GSMA

L’information a été révélée par le Financial Times[2]. La Commission a demandé aux opérateurs des informations sur les «conditions de standardisation des futurs services de communications mobiles».

Pire, la demande d’information concerne également l’association d’opérateurs GSMA[3], association mondiale regroupant 800 opérateurs mobiles et plus de 200 autres industriels du secteur, incluant notamment les fabricants de terminaux, les équipementiers, les fournisseurs de logiciels et de services, dont le but est de définir des normes permettant une circulation fluide des communications et des contenus sur les réseaux mobiles de nouvelle génération.

A croire que le Commissaire à la concurrence ne sait pas comment s’organise un marché et a fortiori celui des télécoms…

L’interopérabilité, un pré-requis incontournable dans les télécoms contemporaines

Heureusement que dans de nombreux secteurs, les acteurs se mettent d’accord pour élaborer des normes et des standards communs… On imagine mal ce qu’il adviendrait si on interdisait aux pétroliers et aux constructeurs automobiles de se mettre d’accord sur la composition des carburants selon les différents types de moteurs.  Retour à la charrette ?

La GSMA est une association qui définit les standards communs dans le domaine de la téléphonie mobile. Quant aux 5 opérateurs européens, ils diffusent un compte-rendu exhaustif de toutes leurs réunions à la Commission européenne, et ne prennent aucune mesures unilatérales : leurs travaux sont transmis à la GSMA, qui choisit les propositions qu’elle souhaite retenir.

Par essence, l’acheminement des communications téléphoniques entre les réseaux de différents opérateurs nécessite la définition de normes communes entre opérateurs…. Ou le retour au monopole !

Aux débuts du téléphone, il existait à Paris 3 compagnies qui n’étaient pas interconnectés entre elles. La concurrence était totale, mais il fallait 3 téléphones différents pour pouvoir joindre tous les abonnés au téléphone. Rapidement le gouvernement a choisi la voie de la nationalisation pour éviter que tout cela ne tourne à l’absurde.

Entrave à l’efficacité des opérateurs européens ?

Depuis 15 ans, la Commission européenne a été incapable d’organiser un marché unifié des télécoms. Alors qu’aux États-Unis ou en Chine, il existe seulement 3 ou 4 acteurs majeurs, en Europe, près de 150 licences sont attribuées à autant d’opérateurs, avec autant de conditions différentes.

A l’heure où Google, Apple, Facebook définissent les standards de l’internet de demain, où Verizon et ATT sont économiquement plus puissants que n’importe quel acteur européen, la Commission préfère mettre des bâtons dans les roues à nos champions européens, leur demandant de baisser les prix à toute vapeur et sous la contrainte, les suspectant immédiatement de s’entendre pour y résister dès qu’ils se réunissent.

La Commission a déjà organisé la liquidation des constructeurs Siemens, Nokia, Ericsson et Alcatel au profit des constructeurs chinois. Elle se propose visiblement de continuer la destruction massive de notre économie numérique.

L’idéologie néolibérale de la concurrence exacerbée comme seul projet

Le plus navrant est que le fameux Joaquin Almunia était dans sa jeunesse un syndicaliste marxiste luttant contre la dictature de Franco, et qu’il est toujours membre du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE).

Mais la Commission européenne comprend-elle les enjeux de la mondialisation ?

L’Europe constitue le premier marché intérieur mondial, offrant de ce fait la formidable opportunité d’y organiser une économie équilibrée, pourvoyeuse d’emplois, de progrès social et certainement de compétitivité technologique. Mais il semble que même les soi-disant défenseurs du peuple ont aujourd’hui choisi de devenir les valets d’une autre dictature : celle de l’idéologie libérale, qui nie travailleurs et citoyens pour se focaliser sur la concurrence « bénéfique pour le consommateur ». Nous en sommes désormais à l’organisation de la concurrence entre les travailleurs, et à la destruction de tous les collectifs. Beau progrès !

Alors que tous les indicateurs dont nous disposons en France sont au rouge[4], nous attendons de la Commission européenne qu’elle contribue au développement de l’économie des télécommunications en Europe.

Combien d’emplois sa politique a-t-elle contribué à créer en Europe, chez les opérateurs de télécoms, les équipementiers, les fournisseurs de services ?

Comment explique-t-elle les retards actuels de l’Europe, qui partait pourtant bien placée dans les années 90, mais qui est aujourd’hui à la traîne de l’Asie en matière de très haut débit ou de paiement par mobile, écrasée par les États-Unis dans le domaine des services phares que sont aujourd’hui des Google ou Facebook ? Et en quoi cette nouvelle enquête va-t-elle permettre de mieux développer nos forces dans ces domaines ?

Et enfin, puisqu’il est aussi question de baisser drastiquement les tarifs du roaming[5], par rapport à quels tarifs la Commission prétend-elle que les télécommunications européennes sont trop chères ?

La CFE-CGC/UNSA et les personnels des opérateurs attendent de la Commission européenne qu’elle soit un accélérateur de développement économique, pas un frein, ni un Père Fouettard systématique !

La filière télécoms en France #1 : l’emploi menacé dans un secteur stratégique

En cette période d’élection présidentielle, les TIC sont, ou devraient être considérés comme un secteur clef de l’économie. Différents lobbies tentent de capter l’intérêt des candidats, avec plus ou mois de succès, comme on peut le lire dans l’analyse détaillée d’Olivier Ezratty, présentée en 6 épisodes sur son blog, sous le titre « Les clivages de la présidentielle sur le numérique »  (le dernier référence tous les autres, mais bien sûr il vaut mieux commencer par le premier).

A la suite de nos travaux d’analyse sur l’emploi chez les opérateurs, que nous mettrons à jour dès que les données annuelles de l’Arcep seront publiées, nous avons voulu aller un peu plus loin et présenter nos propres constats et propositions. Ce premier épisode est consacré aux constats. Le second sera consacré aux leviers d’action que nous avons identifiés. N’hésitez pas à commenter !

Soulignons tout d’abord que la Fédération Française des Télécoms (syndicat professionnel des opérateurs) s’est également cette année livrée à un constat chiffré, réalisé avec le concours d’Arthur D.Little dont voici une synthèse des chiffres clefs du marché.

Les chiffres des emplois induits dans la filière proviennent de l’INSEE, et mériteraient une petite analyse, qualitative (identification et segmentation des codes activités sélectionnés) et historique, que nous n’avons pas eu le temps de réaliser. Mais on voit que la part des équipementiers est extrêmement « light » par rapport à celle des opérateurs.

Les équipementiers européens sont en danger de mort

Les équipementiers français et européens (équipements de réseaux pour les opérateurs télécoms et terminaux pour le grand public) ne cessent de perdre du terrain au profit d’acteurs essentiellement asiatiques, et d’Apple concernant les terminaux grand public innovants (voir par exemple les derniers chiffres publiés par le cabinet IDC sur ce dernier point), et conséquemment des emplois : pas un mois sans qu’on annonce des compressions de personnel chez Alcatel-Lucent, Sagem, Nokia, etc.

La filière télécoms, qui fut florissante en France dans les années 70/80 (peut-être au prix d’un protectionnisme exagéré) est en voie de disparition. A l’époque, l’opérateur historique France Télécom, et auparavant les PTT, s’imposaient de faire les développements technologiques en partenariat avec les équipementiers français, et autour des travaux du CNET, qui a depuis été démantelé, jugé « non rentable » sous la gouvernance de Didier Lombard à France Télécom, et il n’existe plus de pôle de R&D performant pour faire de la recherche prospective dans le domaine des télécommunications en France. Rappelons que la technologie ADSL, diffusée dans le monde entier, était un pur produit des ingénieurs du CNET…

Les opérateurs français délocalisent de plus en plus d’emplois

Délocalisations massives des centres d’appels…

Extrait de notre article Dogme de l’hyper concurrence + consumérisme = délocalisations et décroissance.

L’Allemagne, qui emploie 600 000 téléconseillers sur son territoire, est « naturellement » protégée par la barrière linguistique. L’usage de la langue française dans de nombreux pays à faible coût salarial explique que la France n’en aie que 250 000 sur son sol national.

L’Angleterre quant à elle a 700 000 salariés dans cette activité. Il conviendrait d’aller regarder de plus près ce qui a été fait dans ce pays, pourtant très « libéral » pour préserver les emplois.

Les opérateurs de télécommunications sont les premiers employeurs et/ou donneurs d’ordre dans le domaine des centres d’appels. On estime qu’ils délocalisent au moins 30 000 emplois dans ce métier spécifique. Le gouvernement s’était engagé à agir, mais n’a absolument rien fait malgré ses promesses (plus aucun article sur les tags « centres d’appels » ou « délocalisations » sur le site gouvernemental depuis les promesses de 2010 et nous confirmons qu’aucun plan d’action concret n’a été engagé depuis)

…mais aussi de la R&D

Aucun chiffre officiel sur le sujet, et pour cause, le débat est trop honteux ! Mais, de l’intérieur de France Télécom, nous savons qu’une part de plus en plus importante de la R&D est délocalisée, via des filiales ou des sous-traitants, particulièrement en Inde et en Europe de l’Est (pour des raisons de coûts de main d’œuvre) et au Caire (deal au moment de l’implantation d’Orange en Égypte).

Ni le gouvernement, ni le régulateur
n’assument leurs missions de préservation de l’emploi en France

Ces deux acteurs ignorent superbement cette mission, pourtant inscrite dans le Code des Télécommunications français.

Modalités d’attribution de la licence 4G : aucune contrainte sur l’emploi dans le cahier des charges d’attribution de la licence mobile

Extrait de notre Communiqué CFE-CGC & UNSA Telecoms – licence 4G – 9 juin 2011

L’article L32-1 alinéa I paragraphe 3 du Code des postes et communications Électroniques précise « La fonction de régulation du secteur des communications électroniques est indépendante de l’exploitation des réseaux et de la fourniture des services de communications électroniques. Elle est exercée au nom de l’État par le ministre chargé des communications électroniques et par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. »

Et de poursuive dans son alinéa II : « Dans le cadre de leurs attributions respectives, le ministre chargé des communications électroniques et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes prennent, dans des conditions objectives et transparentes, des mesures raisonnables et proportionnées aux objectifs poursuivis et veillent :

1° A la fourniture et au financement de l’ensemble des composantes du service public des communications électroniques ;

2° A l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ;

3° Au développement de l’emploi, de l’investissement efficace dans les infrastructures, de l’innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques… »

Or dans le projet de décision de l’Arcep il est successivement indiqué :

« Le nombre de lauréats, ainsi que leur quantité de fréquences et leur positionnement, seront définis de façon endogène par la procédure, sur la base des offres que formuleront les candidats au regard des trois critères de sélection (valorisation des fréquences, engagement d’accueil des MVNO, engagement renforcé de couverture départementale). »

« le candidat doit s’assurer qu’il indique pour chacune de ses offres :

– un montant financier exprimé en euros ;

– s’il souscrit ou non à l’engagement d’accueil des MVNO ;

– s’il souscrit ou non à l’engagement lié à l’aménagement du territoire. »

Si le projet de décret est signé en l’état, un constat simple s’impose : aucune obligation sur l’emploi…

Le Ministre méconnait à la fois les dispositions législatives (évoquées ci-dessus) mais aussi l’article 5 du préambule de la Constitution de 19463, qui fait partie du bloc de constitutionnalité et qui dispose que  « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. ».

Opération « tablette à 1 euro » pour les étudiants :
le ministère écarte délibérément Archos, le seul fabricant français de tablettes

Voir la chronique de Sébastien Crozier : Tablette à 1 euro : Monsieur Wauquiez, fermez-la…

Ne parlons pas de l’État actionnaire…

Premier actionnaire de France Télécom-Orange avec 27% du capital (réparti par moitiés entre l’Agence des Participations de l’État et le Fonds d’Investissement Stratégique), l’État, dont les représentants siègent au Conseil d’administration de l’entreprise, ne fait rien pour dynamiser la stratégie de développement des télécommunications en France, qu’il s’agisse de l’investissement dans les nouveaux réseaux ou dans la R&D (quasiment plus de « R », juste des développements avec un ROI court terme). Le seul objectif de l’État semble être de siphonner les résultats de l’entreprise via un dividende exorbitant, dont il touche près d’un milliard d’euros par an.

En 2009, les dividendes ont été supérieurs au résultat net consolidé du Groupe…

Extrait de notre blog dédié à l’actionnariat des personnels du Groupe France Télécom-Orange : Des dividendes trop élevés sont dangereux pour l’entreprise et pour ses personnels.

Le retour du dividende à 0,50 € demandé par l’ADEAS permettrait de revenir au ratio de distribution de 2004, qui apparaissait beaucoup plus raisonnable.

… et en 2010, s’ils n’en représentent que 76%, ils restent supérieurs au bénéfice net courant

Extrait de notre Lettre de l’Épargne et de l’Actionnariat Salariés – juillet 2011

À 1,40 euros par action, le dividende représente pour 2010 76% du résultat net consolidé, et 3 fois le bénéfice net des comptes sociaux (résultat net de l’exercice : 1 067 millions d’euros, dividendes distribués sur l’exercice : 3 708 millions d’euros). Le dividende est payé par le report à nouveau, c’est-à-dire par les bénéfices d’exercices antérieurs, qui devraient être consacrés à l’investissement actuel ou futur.

… ni de l’État fiscal

Extrait de notre lettre ouverte à Christine Lagarde en mars 2011, qui résume l’essentiel de nos critiques sur le rôle de l’Etat vis-à-vis de France Télécom-Orange

17 taxes et 9 redevances pèsent sur les opérateurs de télécommunications, et plus particulièrement l’opérateur historique. Pour le moment, France Télécom paie seul la totalité de l’IFER (Imposition Forfaitaire sur les Entreprises de Réseaux, mise en place pour remplacer la taxe professionnelle) pour le secteur des télécommunications9.

La folie Free, symbole d’une schizophrénie française

Ils sont Free ? Ils n’ont pas tout compris… Plaisanterie mise à part, le million de Français qui, en un mois, ont déjà souscrit aux offres alléchantes du 4 opérateur mobile ne se doutent pas toujours à quel point ils favorisent la délocalisation d’emplois et d’investissements, phénomène qu’ils déplorent par ailleurs. L’engouement spectaculaire pour Free Mobile est révélateur d’une schizophrénie, celle qui oppose, en nous, le consommateur et le producteur, l’agent économique et le citoyen. L’un est arrimé à son pouvoir d’achat, l’autre est attaché à l’emploi. L’un arbitre en faveur de produits et services importés moins chers, l’autre déplore que son pays offre si peu d’emplois nouveaux. Conflit d’intérêts légitimes duquel le consommateur sort presque toujours vainqueur… à court terme.

Lire la suite dans Les Echos du 13/02/2012

Ceux qui nous lisent ici régulièrement verront sans doute la filiation avec notre tribune du 27 janvier dernier dans… La Tribune, que vous pouvez lire ici dans sa version intégrale.

Monsieur Pécresse prend la même volée de bois vert que nous en commentaire de son article, qu’il s’agisse d’aficionados de Free ou d’internautes aux opinions économiques pour le moins « orientées », lorsqu’elles ne font pas tout simplement l’impasse sur une partie des réalités, et nous ne pouvons donc que lui exprimer notre solidarité.

Nous nous réjouissons que la presse économique se fasse le relais de vérités sans doute désagréables à entendre pour certains, mais cependant salutaires, et dont on peut espérer à ce titre qu’elles soient désormais entendues. L’important, c’est que le débat ait lieu, pour que chacun puisse se faire son opinion.

Rappelons par exemple que nous avons été les premiers à dénoncer le niveau des dividendes à France Télécom, dès 2007 lorsqu’ils ont commencé à s’envoler, en 2009 au travers de notre association du personnel actionnaire, et bien sûr en 2010 lorsqu’ils ont dépassé le niveau des bénéfices. Au départ, nous avons été raillés, parfois traités de menteurs alors que nos chiffres provenaient des documents de référence officiels de l’entreprise. Il a fallu attendre le début de cette année pour que le régulateur se rallie à notre position, que le PDG de France Télécom assure que le niveau du dividende n’était pas « gravé dans le marbre » et pour finir que les analystes financiers reprennent, presque mot pour mot, nos revendications de privilégier l’investissement au détriment du dividende.

Nous maintenons que la baisse du dividende est une priorité à France Télécom. Nous déplorons qu’il ait fallu attendre l’arrivée de Free Mobile pour que régulateur et Direction de l’entreprise s’en préoccupent.

Nous demandons aussi que la régulation du secteur des télécoms se préoccupe de l’emploi, comme la loi d’ailleurs le prévoit,  et pas seulement de stimuler la concurrence au profit du consommateur. Nous proposons à tous les Français, citoyens ou leaders d’opinion, une réflexion sur le juste équilibre qu’il convient de trouver entre l’emploi, qui se raréfie dangereusement, et le pouvoir d’achat, dont la baisse des prix n’est pas la composante unique : un salaire décent en est selon nous le meilleur garant.

Nous espérons cette fois être entendus avant que nous mêmes ou nos lecteurs ne soient partis rejoindre la cohorte des chômeurs : les chiffres disent désormais clairement que même les plus qualifiés, porteurs de cette valeur ajoutée qu’on prétendait conserver chez nous pendant qu’on délocaliserait seulement les usines, ne trouvent plus leur place dans la société française contemporaine.

Les opérateurs alternatifs « scandalisés » par l’offre pour MVNO de Free Mobile

Lu sur BusinessMobile.fr :

Alternative Mobile qui regroupe plusieurs MVNO comme Virgin et Prixtel, parle de « mascarade » à propos des tarifs de gros proposés par Free.

Ce jeudi, Free Mobile a finalement publié les composantes de ses offres pour les opérateurs virtuels, conformément à ses engagements liés à sa licence 3G. Il s’agit de permettre à un MVNO de louer le réseau du nouvel entrant pour lancer ses propres offres et in fine d’animer la concurrence.

Outre un ticket d’entrée de 2 millions d’euros, puis 2 euros par carte SIM et par mois, les tarifs proposés Free Mobile facturera à peu près les mêmes prix aux MVNO light et aux Full MVNO avec une minute de voix à 5 centimes et le Mo de data à 5 centimes également.

Par contre, la différence est plus grande pour les SMS avec 4,35 centimes par messages pour les MVNO classiques (3,35 cts à partir du 1er juin) contre 1 centime par message pour les Full MVNO.

Le même support répond à une question cruciale que je me posais ces derniers jours, dans un autre article :

Reste la question de la pertinence de devenir MVNO de Free Mobile aujourd’hui. Rappelons que son réseau ne couvre qu’une partie de la population et qu’un MVNO ne peut prétendre à utiliser le roaming d’Orange qui complète le réseau de Free.

Bref, les MVNO intéressés devront soit attendre que le réseau s’étende, soit utiliser un autre fournisseur pour avoir une couverture satisfaisante. Interrogé par nos soins sur cette question, Anthony Poyac, directeur général de Prixtel déclare :

« Cela n’aura du sens que lorsque Free aura une vraie couverture, ce qui n’est pas le cas pour le moment. Mais cela peut en effet représenter une opportunité pour plus tard ».

Mon esprit rationnel est rassuré. Cela laisse en outre le temps aux MVNOs de faire valoir leurs grief auprès du régulateur, qui ne devrait pas manquer de leur faire droit, en bon aficionados de la concurrence. Et peut-être ces MVNOs voudront également en savoir plus sur la réelle couverture du réseau Free Mobile, pour aujourd’hui et pour demain…

ADSL : Free condamné pour pratiques commerciales trompeuses

Extrait d’un article du 8 février dans Les Echos :

Le fournisseur d’accès bridait la bande passante de ses abonnés non dégroupés. Il écope d’une amende de 100.000 euros.

C’est une vieille affaire qui remonte à la surface. Free a été condamné à 100 000 euros d’amende par le tribunal correctionnel de Paris «pour des pratiques commerciales trompeuses commises au détriment de ses abonnés», a annoncé la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dans un communiqué.

Les services de Bercy avaient reçu en 2007 de nombreuses plaintes de la part de consommateurs. En effet, le fournisseur d’accès à Internet limitait le débit ADSL de ses clients non dégroupés alors qu’il commercialisait une forfait «Internet haut débit illimité». Cette pratique, qui a depuis cessé, s’explique par le fait que, dans ces zones, Free ne disposait pas de ses propres équipements et louait des capacités de réseau à France Télécom. Il reposait donc entièrement sur l’opérateur historique. Pour économiser de l’argent, Free aurait préféré brider la bande passante de certains clients.

Lire la suite sur le site des Echos

Notre commentaire : Xavier Niel ne serait-il donc pas le « chevalier blanc » du consommateur ? Et que va-t-il donc faire à ses clients mobiles dont, pour l’essentiel, le trafic est acheminé sur le réseau… de l’opérateur historique ? L’illimité sera-t-il lui aussi « bridé »,  afin de faire des économies ?

A suivre…

A lire aussi, sur le site du Point : Comment la répression des fraudes a coincé Free

Dogme de l’hyper concurrence + consumérisme = délocalisations et décroissance.

Notre tribune dans La Tribune de ce jour ayant été amputée, sans doute pour des raisons de place disponible (elle est aussi parue dans le journal papier) d’une partie de ce que nous avions écrit, mais également des liens qui permettent de vérifier l’information, nous nous permettons de vous en redonner ici le texte intégral d’origine :

L’un des traits les plus inquiétants de la société de consommation, c’est la schizophrénie du citoyen. Il s’alarme de la fermeture de Lejaby, du chômage de son cousin ingénieur remplacé par un sous-traitant en Inde, et peut-être des délocalisations dans sa propre entreprise. Il sait qu’une large part de l’économie contemporaine est basée sur la production de biens dans des pays à faible coût salarial, consommés dans des pays à plus fort pouvoir d’achat. Mais qu’on lui promette de payer moins cher ce qu’il consomme, et il oublie tout le reste.

Jusqu’à quand le modèle pourra-t-il fonctionner, alors que les délocalisations se sont déjà étendues aux services ?

L’exemple de Free mobile

Le lancement de Free mobile a suscité l’ire des consommateurs, savamment attisée par Xavier Niel, à l’encontre des trois opérateurs qui les auraient pris pour « des pigeons ». Les réactions sont très violentes vis-à-vis de ceux qui osent émettre des critiques sur cette nouvelle offre. Les aficionados énoncent ouvertement préférer défendre leur porte-monnaie plutôt que les salariés des opérateurs, contestant les pertes d’emplois dans les télécommunications françaises (20% perdus en 12 ans, soit 32 000 emplois), pourtant très lisibles dans les chiffres fournis par l’Arcep, régulateur français des télécoms.

Qu’en temps de crise, le consommateur cherche à préserver son pouvoir d’achat, on le comprend. Mais voyons comment baissent les prix des télécommunications.

La baisse du prix des télécoms

D’abord, l’amortissement des réseaux : les télécoms fonctionnent sur un modèle de coût fixe, où le premier client coûte très cher à servir, le nième presque rien (jusqu’au moment où il nécessite l’installation d’un nouvel équipement pour écouler son trafic).

Ensuite, l’évolution technologique : la baisse continue du prix des composants électroniques, combinée à la performance croissante des équipements, réduisent non seulement le coût de l’investissement initial (CAPEX), mais aussi le coût d’exploitation (OPEX) des réseaux dernier cri, pour le même service rendu. Seul le dernier entrant en bénéficie à plein.

Enfin, la concurrence. Le nouvel acteur, pour se faire une place sur le marché, propose le plus souvent un avantage tarifaire. Les autres sont obligés de s’aligner peu ou prou s’ils ne veulent pas voir tous leurs clients les quitter pour le nouveau venu.

Les experts ne savent pas délimiter le pourcentage de baisse des prix attribuable à chacun des facteurs, mais, à l’instar des consommateurs, le régulateur des télécoms parie que la concurrence est le facteur clef. Et pour organiser une concurrence dite « libre et non faussée », l’Arcep fait peser des obligations sur les opérateurs en place, qui sont notamment contraints de… subventionner l’arrivée d’un nouvel entrant via le mécanisme de la terminaison d’appel !

La spirale infernale des délocalisations

Quelles sont les marges de manœuvre pour baisser les prix lorsqu’un nouvel opérateur vient bousculer la donne ? A un instant T, les facteurs technologiques sont à peu près équivalents pour tous. Reste un paramètre, présent dans tous les secteurs d’activité : la main d’œuvre.

Chez les opérateurs télécom, une part significative des effectifs est dans les centres d’appels, pour gérer la relation commerciale et l’assistance clients. Pour baisser les coûts, les opérateurs délocalisent, y compris Free, dont 2000 des 4000 téléconseillers étaient déjà au Maroc avant l’ouverture de Free mobile, et qui a contracté avec des sous-traitants situés dans le même pays pour le lancement de sa nouvelle activité.

Le gouvernement le sait. Malheureusement, depuis les belles intentions de M. Wauquiez en 2010, on attend en vain les bilans de relocalisation.

Les licences de téléphonie auraient pu être attribuées sous condition de ne délocaliser hors d’Europe ni les centres d’appels ni la fabrication des équipements. Mais le régulateur n’en a rien fait, y compris pour la licence 4G, alors qu’une telle mesure ne coûtait rien, et ne créait aucune distorsion de concurrence si elle était appliquée à tous les acteurs. Ne serait-ce pas le rôle d’un régulateur de protéger l’emploi plutôt que de se faire le chantre du consumérisme ?

L’Allemagne, qui emploie 600 000 téléconseillers sur son territoire, est « naturellement » protégée par la barrière linguistique. L’usage de la langue française dans de nombreux pays à faible coût salarial explique que la France n’en aie que 250 000 sur son sol national.

Les délocalisations appauvrissent la nation. Elles accentuent le déficit de la balance commerciale par l’achat de prestations à l’étranger. Elles exportent un pouvoir d’achat qui favorise la consommation, privant la France d’un moteur essentiel de croissance. Et elles font porter sur l’ensemble de l’économie française la charge du chômage de masse, renchérissant d’autant le coût du travail, qui nuit à notre compétitivité. Les délocalisations entraînent donc l’économie nationale dans une spirale négative.

Aucun des politiques Interrogés sur le lancement de Free mobile ne semble avoir compris ces enjeux, étrangement absents en pleine campagne présidentielle…

Devant la catastrophe qu’il a lui-même organisée, le régulateur se sent aujourd’hui obligé de mettre en lumière les dividendes extravagants servis par l’opérateur historique sous la pression de l’État. Comme nous le soulignons depuis 2009, cela pèse sur l’investissement comme sur l’emploi. Combien de temps ce même régulateur mettra-t-il à comprendre la nécessité de limiter les délocalisations ?

Mais puisque c’est encore le temps des vœux, nous souhaitons à tous les consommateurs de conserver (ou de trouver) un emploi, premier garant de leur pouvoir d’achat.