La filière télécoms en France #1 : l’emploi menacé dans un secteur stratégique

En cette période d’élection présidentielle, les TIC sont, ou devraient être considérés comme un secteur clef de l’économie. Différents lobbies tentent de capter l’intérêt des candidats, avec plus ou mois de succès, comme on peut le lire dans l’analyse détaillée d’Olivier Ezratty, présentée en 6 épisodes sur son blog, sous le titre « Les clivages de la présidentielle sur le numérique »  (le dernier référence tous les autres, mais bien sûr il vaut mieux commencer par le premier).

A la suite de nos travaux d’analyse sur l’emploi chez les opérateurs, que nous mettrons à jour dès que les données annuelles de l’Arcep seront publiées, nous avons voulu aller un peu plus loin et présenter nos propres constats et propositions. Ce premier épisode est consacré aux constats. Le second sera consacré aux leviers d’action que nous avons identifiés. N’hésitez pas à commenter !

Soulignons tout d’abord que la Fédération Française des Télécoms (syndicat professionnel des opérateurs) s’est également cette année livrée à un constat chiffré, réalisé avec le concours d’Arthur D.Little dont voici une synthèse des chiffres clefs du marché.

Les chiffres des emplois induits dans la filière proviennent de l’INSEE, et mériteraient une petite analyse, qualitative (identification et segmentation des codes activités sélectionnés) et historique, que nous n’avons pas eu le temps de réaliser. Mais on voit que la part des équipementiers est extrêmement « light » par rapport à celle des opérateurs.

Les équipementiers européens sont en danger de mort

Les équipementiers français et européens (équipements de réseaux pour les opérateurs télécoms et terminaux pour le grand public) ne cessent de perdre du terrain au profit d’acteurs essentiellement asiatiques, et d’Apple concernant les terminaux grand public innovants (voir par exemple les derniers chiffres publiés par le cabinet IDC sur ce dernier point), et conséquemment des emplois : pas un mois sans qu’on annonce des compressions de personnel chez Alcatel-Lucent, Sagem, Nokia, etc.

La filière télécoms, qui fut florissante en France dans les années 70/80 (peut-être au prix d’un protectionnisme exagéré) est en voie de disparition. A l’époque, l’opérateur historique France Télécom, et auparavant les PTT, s’imposaient de faire les développements technologiques en partenariat avec les équipementiers français, et autour des travaux du CNET, qui a depuis été démantelé, jugé « non rentable » sous la gouvernance de Didier Lombard à France Télécom, et il n’existe plus de pôle de R&D performant pour faire de la recherche prospective dans le domaine des télécommunications en France. Rappelons que la technologie ADSL, diffusée dans le monde entier, était un pur produit des ingénieurs du CNET…

Les opérateurs français délocalisent de plus en plus d’emplois

Délocalisations massives des centres d’appels…

Extrait de notre article Dogme de l’hyper concurrence + consumérisme = délocalisations et décroissance.

L’Allemagne, qui emploie 600 000 téléconseillers sur son territoire, est « naturellement » protégée par la barrière linguistique. L’usage de la langue française dans de nombreux pays à faible coût salarial explique que la France n’en aie que 250 000 sur son sol national.

L’Angleterre quant à elle a 700 000 salariés dans cette activité. Il conviendrait d’aller regarder de plus près ce qui a été fait dans ce pays, pourtant très « libéral » pour préserver les emplois.

Les opérateurs de télécommunications sont les premiers employeurs et/ou donneurs d’ordre dans le domaine des centres d’appels. On estime qu’ils délocalisent au moins 30 000 emplois dans ce métier spécifique. Le gouvernement s’était engagé à agir, mais n’a absolument rien fait malgré ses promesses (plus aucun article sur les tags « centres d’appels » ou « délocalisations » sur le site gouvernemental depuis les promesses de 2010 et nous confirmons qu’aucun plan d’action concret n’a été engagé depuis)

…mais aussi de la R&D

Aucun chiffre officiel sur le sujet, et pour cause, le débat est trop honteux ! Mais, de l’intérieur de France Télécom, nous savons qu’une part de plus en plus importante de la R&D est délocalisée, via des filiales ou des sous-traitants, particulièrement en Inde et en Europe de l’Est (pour des raisons de coûts de main d’œuvre) et au Caire (deal au moment de l’implantation d’Orange en Égypte).

Ni le gouvernement, ni le régulateur
n’assument leurs missions de préservation de l’emploi en France

Ces deux acteurs ignorent superbement cette mission, pourtant inscrite dans le Code des Télécommunications français.

Modalités d’attribution de la licence 4G : aucune contrainte sur l’emploi dans le cahier des charges d’attribution de la licence mobile

Extrait de notre Communiqué CFE-CGC & UNSA Telecoms – licence 4G – 9 juin 2011

L’article L32-1 alinéa I paragraphe 3 du Code des postes et communications Électroniques précise « La fonction de régulation du secteur des communications électroniques est indépendante de l’exploitation des réseaux et de la fourniture des services de communications électroniques. Elle est exercée au nom de l’État par le ministre chargé des communications électroniques et par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. »

Et de poursuive dans son alinéa II : « Dans le cadre de leurs attributions respectives, le ministre chargé des communications électroniques et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes prennent, dans des conditions objectives et transparentes, des mesures raisonnables et proportionnées aux objectifs poursuivis et veillent :

1° A la fourniture et au financement de l’ensemble des composantes du service public des communications électroniques ;

2° A l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ;

3° Au développement de l’emploi, de l’investissement efficace dans les infrastructures, de l’innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques… »

Or dans le projet de décision de l’Arcep il est successivement indiqué :

« Le nombre de lauréats, ainsi que leur quantité de fréquences et leur positionnement, seront définis de façon endogène par la procédure, sur la base des offres que formuleront les candidats au regard des trois critères de sélection (valorisation des fréquences, engagement d’accueil des MVNO, engagement renforcé de couverture départementale). »

« le candidat doit s’assurer qu’il indique pour chacune de ses offres :

– un montant financier exprimé en euros ;

– s’il souscrit ou non à l’engagement d’accueil des MVNO ;

– s’il souscrit ou non à l’engagement lié à l’aménagement du territoire. »

Si le projet de décret est signé en l’état, un constat simple s’impose : aucune obligation sur l’emploi…

Le Ministre méconnait à la fois les dispositions législatives (évoquées ci-dessus) mais aussi l’article 5 du préambule de la Constitution de 19463, qui fait partie du bloc de constitutionnalité et qui dispose que  « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. ».

Opération « tablette à 1 euro » pour les étudiants :
le ministère écarte délibérément Archos, le seul fabricant français de tablettes

Voir la chronique de Sébastien Crozier : Tablette à 1 euro : Monsieur Wauquiez, fermez-la…

Ne parlons pas de l’État actionnaire…

Premier actionnaire de France Télécom-Orange avec 27% du capital (réparti par moitiés entre l’Agence des Participations de l’État et le Fonds d’Investissement Stratégique), l’État, dont les représentants siègent au Conseil d’administration de l’entreprise, ne fait rien pour dynamiser la stratégie de développement des télécommunications en France, qu’il s’agisse de l’investissement dans les nouveaux réseaux ou dans la R&D (quasiment plus de « R », juste des développements avec un ROI court terme). Le seul objectif de l’État semble être de siphonner les résultats de l’entreprise via un dividende exorbitant, dont il touche près d’un milliard d’euros par an.

En 2009, les dividendes ont été supérieurs au résultat net consolidé du Groupe…

Extrait de notre blog dédié à l’actionnariat des personnels du Groupe France Télécom-Orange : Des dividendes trop élevés sont dangereux pour l’entreprise et pour ses personnels.

Le retour du dividende à 0,50 € demandé par l’ADEAS permettrait de revenir au ratio de distribution de 2004, qui apparaissait beaucoup plus raisonnable.

… et en 2010, s’ils n’en représentent que 76%, ils restent supérieurs au bénéfice net courant

Extrait de notre Lettre de l’Épargne et de l’Actionnariat Salariés – juillet 2011

À 1,40 euros par action, le dividende représente pour 2010 76% du résultat net consolidé, et 3 fois le bénéfice net des comptes sociaux (résultat net de l’exercice : 1 067 millions d’euros, dividendes distribués sur l’exercice : 3 708 millions d’euros). Le dividende est payé par le report à nouveau, c’est-à-dire par les bénéfices d’exercices antérieurs, qui devraient être consacrés à l’investissement actuel ou futur.

… ni de l’État fiscal

Extrait de notre lettre ouverte à Christine Lagarde en mars 2011, qui résume l’essentiel de nos critiques sur le rôle de l’Etat vis-à-vis de France Télécom-Orange

17 taxes et 9 redevances pèsent sur les opérateurs de télécommunications, et plus particulièrement l’opérateur historique. Pour le moment, France Télécom paie seul la totalité de l’IFER (Imposition Forfaitaire sur les Entreprises de Réseaux, mise en place pour remplacer la taxe professionnelle) pour le secteur des télécommunications9.

Free Mobile : quelques enseignements intéressants en matière de « community management »

Pour changer un peu des polémiques sur Free Mobile, intéressons-nous à la riposte des autres opérateurs, et plus particulièrement à la manière dont Bouygues Telecom a géré le dialogue avec ses clients dans les réseaux sociaux, dans un moment de crise tout à fait particulier, le discours de Xavier Niel ayant littéralement incité les consommateurs à la violence vis à vis des opérateurs mobiles « historiques ».

10 minutes d’interview vidéo du « Community Manager » de BT, et 10 enseignements synthétisés par le rédacteur de l’article.  Prêts ? c’est sur Le blog de Greg

Free mobile : une arrivée pas si fracassante que ça ?

Ce qui est intéressant avec l’arrivée de Free Mobile, c’est que le « buzz », plus important que jamais, fournit de la matière à l’analyse du phénomène, en quantité et très rapidement. Aujourd’hui, Boursier.com se fait l’écho des désappointements des consommateurs, déçus par les délais, la qualité (voire l’absence) de service :

Du côté des usagers, la gueule de bois a fait suite à l’euphorie des premiers jours : Absence de portabilité, retard de livraison des cartes SIM, service clientèle débordé, certains utilisateurs crient à l’arnaque, comme ce client  » free adsl depuis 2005″ dont l’inscription est « dans l’impasse depuis le 11 janvier ».  » Inacceptable « , juge-t-il dans message posté sur le Twitter de Xavier Niel.

« Plus de 3 semaines que j’attends ma carte SIM. Pourtant j’avais déjà Free mais cette fois je n’ai pas tout compris ! » , ajoute cet abonné sur la page Facebook de Free Mobile. Sur le réseau social, une utilisatrice toujours dans l’attente, a donc tenté de passer par le « 3244 ». « Certes des tarifs compétitifs, c’est bien mais si le reste suit, c’est beaucoup mieux », prévient-elle. « C’est vraiment de l’amateurisme, comment n’ont-ils pu prévoir un tel engouement ? », s’interroge encore un nouvel abonné sur le réseau social.

Au delà des griefs factuels, et en lien avec nos précédentes positions sut la question, le terme « d’amateurisme » frappe : les consommateurs voudraient que ce soit à la fois, rapide, efficace, impeccablement professionnel, et pas cher, voire gratuit.

Dans le même temps, en tant que syndicalistes nous sommes bien placés pour le savoir, lorsqu’ils sont salariés, ils se plaignent (très souvent à juste titre) d’être de moins en moins nombreux pour assumer une quantité de travail toujours croissante, de moins en moins bien rémunérés, de moins en moins bien formés, et au final de ne pas avoir les moyens de faire « du travail bien fait » qui leur permettrait de se sentir bien dans leur vie professionnelle. L’analyse des suicides en milieu professionnel montre que ce sont les salariés les plus investis, les plus professionnels, qui sont les plus déstabilisés par cette déconstruction du travail.

A bien y regarder, le ressenti du consommateur et du travailleur se font écho, ils sont les deux facettes d’une même réalité, qui interroge sur cette société du toujours plus, toujours plus vite, pour toujours moins cher (mais quand même toujours plus de profits pour certains), qui forcément aboutit à du « toujours plus bâclé », tout aussi frustrant pour le client que pour le salarié…

Est-ce cette vie que nous voulons ? Est-elle satisfaisante ? Ne faut-il pas rechercher un nouvel équilibre ? Des méthodes de travail où l’on se donnerait le temps de bien faire les choses ? Cela s’appelle aussi l’efficience, et c’est souvent au final moins coûteux que de réparer ce qui a été mal fait dans un processus bâclé (mais tout le monde fait semblant de croire que le bâclé est plus rentable, comptant sur le fait que « ça passera » peut-être comme ça, que le client ne le verra pas, ou aura la flemme de réclamer, ou qu’en maniant le bâton un peu plus fort, on parviendra à ce que les personnels fassent « vite et bien »).  Du côté du salarié, ce serait surtout moins frustrant. Heureux au travail, il éprouverait sans doute moins le besoin de consommer sans discernement (et donc de chercher des tarifs toujours plus bas), ou pire, d’insulter les salariés des autres entreprises, pour se défouler de ses propres frustrations…

Pour revenir à Free Mobile, l’article de Boursier.com mentionne que certains clients reviennent chez leur opérateur d’origine, mais aussi que l’ensemble des acteurs a revu ses offres « low cost », pour les alléger davantage, sans doute une fois de plus au détriment de la qualité, ce qui engendrera de nouvelles frustrations, des personnels comme des clients.

Ce qui ne reviendra pas, c’est toute la valeur perdue. Les tarifs ont définitivement pris un coup dans l’aile, sans doute pour le bonheur des consommateurs, mais combien de salariés perdront leur emploi, ou devront travailler toujours plus vite au détriment de leur qualité de vie professionnelle ? Et combien d’heures perdues pour traiter des résiliations puis des réabonnements pour les mêmes clients, alors que pendant ce temps ils auraient pu se consacrer à d’autres tâches plus gratifiantes, et plus porteuses de valeur, tant pour leurs clients que pour leur entreprise ?

Racheter son entreprise pour ne pas subir la crise

Ce sont les nouveaux patrons de Fibrosud. Ils nous accueillent dans une salle de réunion qui ressemble à n’importe quelle autre. Ils sont six et ont décidé, en décembre 2011, de racheter les outils de travail pour ne pas laisser tomber un site qui, ils en sont certains et entendent le prouver, est rentable. Leur boulot, c’est d’assurer « la réparation et de la maintenance de tout ce qui est derrière une ligne téléphonique : fax, terminal de paiement, box Internet, etc. », comme le raconte François Perabo, responsable de la qualité et de la sécurité, l’un des six cadres qui relancent l’activité.

Lire la suite sur le site du Monde

Nous souhaitons de tout cœur la réussite à ce groupe de salariés, et une longue vie à Fibrosud.

Ne pas se laisser manger par les fonds de pension, préserver les emplois, conserver les compétences, recycler et maintenir le matériel, autant de luttes plus indispensables que jamais… même dans le secteur des télécommunications, qui, bien qu’en croissance financière, détruit des emplois en France.

Les opérateurs alternatifs « scandalisés » par l’offre pour MVNO de Free Mobile

Lu sur BusinessMobile.fr :

Alternative Mobile qui regroupe plusieurs MVNO comme Virgin et Prixtel, parle de « mascarade » à propos des tarifs de gros proposés par Free.

Ce jeudi, Free Mobile a finalement publié les composantes de ses offres pour les opérateurs virtuels, conformément à ses engagements liés à sa licence 3G. Il s’agit de permettre à un MVNO de louer le réseau du nouvel entrant pour lancer ses propres offres et in fine d’animer la concurrence.

Outre un ticket d’entrée de 2 millions d’euros, puis 2 euros par carte SIM et par mois, les tarifs proposés Free Mobile facturera à peu près les mêmes prix aux MVNO light et aux Full MVNO avec une minute de voix à 5 centimes et le Mo de data à 5 centimes également.

Par contre, la différence est plus grande pour les SMS avec 4,35 centimes par messages pour les MVNO classiques (3,35 cts à partir du 1er juin) contre 1 centime par message pour les Full MVNO.

Le même support répond à une question cruciale que je me posais ces derniers jours, dans un autre article :

Reste la question de la pertinence de devenir MVNO de Free Mobile aujourd’hui. Rappelons que son réseau ne couvre qu’une partie de la population et qu’un MVNO ne peut prétendre à utiliser le roaming d’Orange qui complète le réseau de Free.

Bref, les MVNO intéressés devront soit attendre que le réseau s’étende, soit utiliser un autre fournisseur pour avoir une couverture satisfaisante. Interrogé par nos soins sur cette question, Anthony Poyac, directeur général de Prixtel déclare :

« Cela n’aura du sens que lorsque Free aura une vraie couverture, ce qui n’est pas le cas pour le moment. Mais cela peut en effet représenter une opportunité pour plus tard ».

Mon esprit rationnel est rassuré. Cela laisse en outre le temps aux MVNOs de faire valoir leurs grief auprès du régulateur, qui ne devrait pas manquer de leur faire droit, en bon aficionados de la concurrence. Et peut-être ces MVNOs voudront également en savoir plus sur la réelle couverture du réseau Free Mobile, pour aujourd’hui et pour demain…

ADSL : Free condamné pour pratiques commerciales trompeuses

Extrait d’un article du 8 février dans Les Echos :

Le fournisseur d’accès bridait la bande passante de ses abonnés non dégroupés. Il écope d’une amende de 100.000 euros.

C’est une vieille affaire qui remonte à la surface. Free a été condamné à 100 000 euros d’amende par le tribunal correctionnel de Paris «pour des pratiques commerciales trompeuses commises au détriment de ses abonnés», a annoncé la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dans un communiqué.

Les services de Bercy avaient reçu en 2007 de nombreuses plaintes de la part de consommateurs. En effet, le fournisseur d’accès à Internet limitait le débit ADSL de ses clients non dégroupés alors qu’il commercialisait une forfait «Internet haut débit illimité». Cette pratique, qui a depuis cessé, s’explique par le fait que, dans ces zones, Free ne disposait pas de ses propres équipements et louait des capacités de réseau à France Télécom. Il reposait donc entièrement sur l’opérateur historique. Pour économiser de l’argent, Free aurait préféré brider la bande passante de certains clients.

Lire la suite sur le site des Echos

Notre commentaire : Xavier Niel ne serait-il donc pas le « chevalier blanc » du consommateur ? Et que va-t-il donc faire à ses clients mobiles dont, pour l’essentiel, le trafic est acheminé sur le réseau… de l’opérateur historique ? L’illimité sera-t-il lui aussi « bridé »,  afin de faire des économies ?

A suivre…

A lire aussi, sur le site du Point : Comment la répression des fraudes a coincé Free

Le feuilleton « Free Mobile a-t-il allumé ses antennes » continue

Paru dans Ecrans / Libération du 3 février 2012 :

Hier, selon nos informations, SFR a écrit à l’ARCEP, le régulateur des télécoms. Ce courrier était accompagné d’environ 3000 mesures, faites sous le contrôle d’huissiers dans cinq villes, dans l’Ouest (Caen, Nantes, …) et également à Paris. L’opérateur ne s’est pas contenté de détecter si les antennes de Free Mobile étaient allumées. Des appels ont été passés, selon les protocoles habituellement utilisés pour contrôler les obligations de couverture des opérateurs. Il s’agit de vérifier non seulement si le réseau Free est capté par le mobile équipé d’une puce Free, mais si les appels aboutissent dans une proportion significative, et si la communication est de bonne qualité.

[…]

Jean-Ludovic Silicani, le patron de l’Arcep, avait programmé cette campagne concernant Free dès le 25 janvier. De son côté, Eric Besson est monté lui aussi au créneau. Last but not least, le syndicat CFE-CGC/Unsa de France Télécom est revenu à la charge il y a deux jours pour demander l’ouverture d’une procédure de sanction. Sébastien Crozier, le porte-parole du syndicat, conteste l’autorisation d’émettre donnée à Free Mobile et réclame une enquête contradictoire, déniant au nouvel opérateur le droit de poursuivre l’exploitation de son service. Jamais, selon un proche du dossier, dans la longue histoire de l’ouverture du secteur télécom à la concurrence, « la violence des attaques contre un opérateur, n’a atteint ces sommets ».

Vous pouvez lire l’article complet sur le site Ecrans.

Un petit commentaire : si la violence des attaque contre un opérateur n’a jamais atteint ces sommets, c’est sans doute parce que la violence des attaques portées par un nouvel entrant contre les opérateurs en place, accusés d’avoir pris leurs clients pour des « pigeons » ou des « vaches à lait », n’avait non plus jamais atteint ces sommets. Qui sème le vent…

Procédure de sanction contre Free Mobile : Mise au point adressée à l’ARCEP

Suite à notre intervention du 24 janvier auprès de l’Arcep, et aux différentes communications qu’elle a engendrée, nous adressons ce jour un courrier de précision à l’Arcep.

  • ou lire le texte directement sur cette page en cliquant sur « lire la suite »

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Dogme de l’hyper concurrence + consumérisme = délocalisations et décroissance.

Notre tribune dans La Tribune de ce jour ayant été amputée, sans doute pour des raisons de place disponible (elle est aussi parue dans le journal papier) d’une partie de ce que nous avions écrit, mais également des liens qui permettent de vérifier l’information, nous nous permettons de vous en redonner ici le texte intégral d’origine :

L’un des traits les plus inquiétants de la société de consommation, c’est la schizophrénie du citoyen. Il s’alarme de la fermeture de Lejaby, du chômage de son cousin ingénieur remplacé par un sous-traitant en Inde, et peut-être des délocalisations dans sa propre entreprise. Il sait qu’une large part de l’économie contemporaine est basée sur la production de biens dans des pays à faible coût salarial, consommés dans des pays à plus fort pouvoir d’achat. Mais qu’on lui promette de payer moins cher ce qu’il consomme, et il oublie tout le reste.

Jusqu’à quand le modèle pourra-t-il fonctionner, alors que les délocalisations se sont déjà étendues aux services ?

L’exemple de Free mobile

Le lancement de Free mobile a suscité l’ire des consommateurs, savamment attisée par Xavier Niel, à l’encontre des trois opérateurs qui les auraient pris pour « des pigeons ». Les réactions sont très violentes vis-à-vis de ceux qui osent émettre des critiques sur cette nouvelle offre. Les aficionados énoncent ouvertement préférer défendre leur porte-monnaie plutôt que les salariés des opérateurs, contestant les pertes d’emplois dans les télécommunications françaises (20% perdus en 12 ans, soit 32 000 emplois), pourtant très lisibles dans les chiffres fournis par l’Arcep, régulateur français des télécoms.

Qu’en temps de crise, le consommateur cherche à préserver son pouvoir d’achat, on le comprend. Mais voyons comment baissent les prix des télécommunications.

La baisse du prix des télécoms

D’abord, l’amortissement des réseaux : les télécoms fonctionnent sur un modèle de coût fixe, où le premier client coûte très cher à servir, le nième presque rien (jusqu’au moment où il nécessite l’installation d’un nouvel équipement pour écouler son trafic).

Ensuite, l’évolution technologique : la baisse continue du prix des composants électroniques, combinée à la performance croissante des équipements, réduisent non seulement le coût de l’investissement initial (CAPEX), mais aussi le coût d’exploitation (OPEX) des réseaux dernier cri, pour le même service rendu. Seul le dernier entrant en bénéficie à plein.

Enfin, la concurrence. Le nouvel acteur, pour se faire une place sur le marché, propose le plus souvent un avantage tarifaire. Les autres sont obligés de s’aligner peu ou prou s’ils ne veulent pas voir tous leurs clients les quitter pour le nouveau venu.

Les experts ne savent pas délimiter le pourcentage de baisse des prix attribuable à chacun des facteurs, mais, à l’instar des consommateurs, le régulateur des télécoms parie que la concurrence est le facteur clef. Et pour organiser une concurrence dite « libre et non faussée », l’Arcep fait peser des obligations sur les opérateurs en place, qui sont notamment contraints de… subventionner l’arrivée d’un nouvel entrant via le mécanisme de la terminaison d’appel !

La spirale infernale des délocalisations

Quelles sont les marges de manœuvre pour baisser les prix lorsqu’un nouvel opérateur vient bousculer la donne ? A un instant T, les facteurs technologiques sont à peu près équivalents pour tous. Reste un paramètre, présent dans tous les secteurs d’activité : la main d’œuvre.

Chez les opérateurs télécom, une part significative des effectifs est dans les centres d’appels, pour gérer la relation commerciale et l’assistance clients. Pour baisser les coûts, les opérateurs délocalisent, y compris Free, dont 2000 des 4000 téléconseillers étaient déjà au Maroc avant l’ouverture de Free mobile, et qui a contracté avec des sous-traitants situés dans le même pays pour le lancement de sa nouvelle activité.

Le gouvernement le sait. Malheureusement, depuis les belles intentions de M. Wauquiez en 2010, on attend en vain les bilans de relocalisation.

Les licences de téléphonie auraient pu être attribuées sous condition de ne délocaliser hors d’Europe ni les centres d’appels ni la fabrication des équipements. Mais le régulateur n’en a rien fait, y compris pour la licence 4G, alors qu’une telle mesure ne coûtait rien, et ne créait aucune distorsion de concurrence si elle était appliquée à tous les acteurs. Ne serait-ce pas le rôle d’un régulateur de protéger l’emploi plutôt que de se faire le chantre du consumérisme ?

L’Allemagne, qui emploie 600 000 téléconseillers sur son territoire, est « naturellement » protégée par la barrière linguistique. L’usage de la langue française dans de nombreux pays à faible coût salarial explique que la France n’en aie que 250 000 sur son sol national.

Les délocalisations appauvrissent la nation. Elles accentuent le déficit de la balance commerciale par l’achat de prestations à l’étranger. Elles exportent un pouvoir d’achat qui favorise la consommation, privant la France d’un moteur essentiel de croissance. Et elles font porter sur l’ensemble de l’économie française la charge du chômage de masse, renchérissant d’autant le coût du travail, qui nuit à notre compétitivité. Les délocalisations entraînent donc l’économie nationale dans une spirale négative.

Aucun des politiques Interrogés sur le lancement de Free mobile ne semble avoir compris ces enjeux, étrangement absents en pleine campagne présidentielle…

Devant la catastrophe qu’il a lui-même organisée, le régulateur se sent aujourd’hui obligé de mettre en lumière les dividendes extravagants servis par l’opérateur historique sous la pression de l’État. Comme nous le soulignons depuis 2009, cela pèse sur l’investissement comme sur l’emploi. Combien de temps ce même régulateur mettra-t-il à comprendre la nécessité de limiter les délocalisations ?

Mais puisque c’est encore le temps des vœux, nous souhaitons à tous les consommateurs de conserver (ou de trouver) un emploi, premier garant de leur pouvoir d’achat.

La CFE-CGC & l’UNSA Télécoms saisissent l’Arcep à propos de Free mobile

Demande d’ouverture d’une procédure d’enquête à l’encontre de FREE MOBILE sur le fondement de l’article L.36-11 du Code des Postes et Communications Électroniques

Les Syndicats CFE-CGC & UNSA des opérateurs télécoms mobiles ont saisi l’ARCEP en raison d’une forte préoccupation relative au respect par FREE MOBILE de ses obligations réglementaires, lesquelles auraient, si elles étaient confirmées, des impacts majeurs sur l’emploi et les investissements en France.

Free mobile : Xavier Niel prend-il tous les Français pour des c… ?

Selon une étude du cabinet GFK, et sur la base de l’offre décrite par Xavier Niel devant les médias, 8 Français sur 10 ont l’intention, à court ou moyen terme, de souscrire à l’offre de téléphonie mobile de Free.

Mais comment s’y prend Free pour monter son offre illimitée à 19,99 € / mois (15,99 € pour les abonnés ADSL Free) et son forfait 60 minutes / 60 SMS pour 2 € / mois (0 pour les abonnés ADSL Free) ?

Quelles seront les incidences cette nouvelle offre sur le marché des télécommunications en France ? Et que se passera-t-il si les Français interrogés confirment par des actes leurs intentions de basculer chez Free mobile ?

La diffusion des TIC dans la société française

Le Credoc publie chaque année un rapport sur la diffusion des Technologies de l’Information et de la Communication dans la société française.

En extrême synthèse, voici les points saillants qu’on peut retenir de l’étude 2011 :

  • la tendance de retour à l’équipement en téléphonie fixe, initiée en 2005, se poursuit
  • les 3/4 des Français disposent conjointement du fixe et du mobile, et la même proportion dispose du haut débit à domicile
  • les TIC se diffusent + rapidement en France qu’en Europe, et c’est la nouvelle technologie qui s’est le plus rapidement diffusée dans l’histoire connue des équipements grand public
  • cette diffusion concerne toutes les couches de la population, mais la « fracture numérique » se situe au niveau du nombre et de la sophistication des terminaux connectés dont on dispose
  • même en période de crise, les arbitrages budgétaires des ménages continuent à préserver les TIC
  • les Français ont du mal à se passer d’Internet + de 3 jours de suite
  • corrélativement à une présence accrue sur les réseaux sociaux (40% des Français sont inscrits ) et à la diversification des usages, le tiers des Français s’inquiète pour la protection de ses données personnelles

L’étude complète est disponible sur le site de l’Arcep, et l’on peut retrouver les archives des années précédentes sur le site du Credoc

Les Français et le nouveau monde numérique

TNS Sofres vient de réaliser une étude pour l’INRIA sur la perception du numérique par les Français. Cette étude sera suivie régulièrement, pour constituer une base de travail pour l’INRIA, organisme public de recherche dédié aux sciences et technologies du numérique.

On trouve notamment dans cette étude une « classification » des Français en 6 « typologies » d’utilisateurs, comme aiment à les construire les organismes d’études, même si cette approche reste assez réductrice.

Pour en savoir plus, on peut réécouter l’émission de France Inter « Quels « homo-numericus » sommes nous ? « .

Ce qu’on peut en retenir, brièvement, c’est qu’il reste beaucoup de confusion dans les esprits, y compris dans les catégories définies par cette étude, et que l’urgence est de former les jeunes Français, d’une part à la connaissance des technologies numériques, et d’autre part à la manière d’appréhender l’information, dont la diffusion est totalement bouleversée par Internet, à la fois en tant qu’utilisateur et contributeur. C’est un enjeu majeur, tant de l’économie du savoir que de la démocratie.

Les résultats de l’étude sur :

 

Claude Guéant et les fadettes

Dans une interview donnée au Monde, datée du jeudi 26 octobre, le Ministre de l’Intérieur, Monsieur Guéant prétend « que le droit n’est pas suffisamment précis » et « qu’il faudrait légiférer pour préciser cette question de l’utilisation des fadettes ».

Car selon lui, la loi de 1991 sur les interceptions de sécurité « ne prévoyait pas le cas des factures téléphoniques détaillées de téléphones portables car ils n’existaient pas ».

C’est en 1986 qu’est lancé le réseau Radiocom 2000. C’est le réseau de téléphone mobile français qui remplaça progressivement le réseau analogique appelé « correspondance publique ».

Radiocom 2000 utilise la bande de fréquence des 400 MHz, et on le classe dans la catégorie des mobiles de première génération : la 1G.

C’est avec Radiocom 2000 que se développent les  premiers pas de la téléphonie dite cellulaire avec, l’apparition du hand over (capacité de changer de cellule dynamiquement), et de l’attribution de fréquences différentes au sein d’une même cellule.

Très rapidement, le réseau couvre la quasi-totalité du territoire.

C’est en 1991 que démarre commercialement l’exploitation du réseau GSM.  A cette époque, Radiocom 2000 et son concurrent SFR disposaient de 350 000 abonnés.

Tous les grands commis de l’Etat disposaient d’un téléphone Radiocom 2000, parmi lesquels – à n’en pas douter – Monsieur Guéant lorsqu’il n’était encore en 1991 que le simple préfet des Alpes…

Les factures détaillées des appels passés (les fameuses fadettes) existent depuis les années 1980 sur le fixe avec la numérisation complète du téléphone fixe.

Elles permettent au client de connaître le prix de chaque communication passée et s’il le souhaite le correspondant appelé. Elles ne différent en rien de celles des portables d’aujourd’hui…

Mais à l’époque de Radiocom 2000, l’abonné était facturé non seulement lorsqu’il émettait des appels, mais aussi lorsqu’il en recevait, et la facture détaillée en faisait état…

Dans l’affaire Squarcini, on confond souvent l’obtention d’une fadette, simple copie de la facture commerciale adressée au client, et la recherche plus poussée qu’une autorité administrative peut demander à savoir : non seulement le détail complet des appels passés (si ils ne sont pas présent sur la facturation détaillée), mais aussi l’ensemble des appels reçus et leur origine.

Il est difficile de concevoir que Monsieur Guéant ait voulu abuser l’opinion pour justifier sa proposition de légiférer sur les fadettes, d’où une légitime question : « Monsieur Guéant est-il atteint d’Alzheimer ? »

Communiquer ou innover ?

Lors de l’e-G8 organisé aux frais de la République et du contribuable par le remarquable Monsieur Besson et l’agence de communication Publicis, c’est entre deux coupes de champagne et petits fours au caviar que le dirigeant de cette dernière et celui de France Télécom ont eu l’idée d’un fond d’investissement de 150 millions d’euros destiné  aux start- up dans le domaine des nouvelles technologies.

Publicis a pris tardivement le virage du numérique. Ce n’est qu’en 2006 qu’il prend conscience de son retard dans le domaine.

En 5 ans, Publicis s’est vu contraint à investir près de 3 milliards d’euros, notamment en rachetant successivement Digitas à la fin 2006, Business Interactif, l’agence interactive française en 2007, les agences interactives Modem Media aux États-Unis et Wcube en France, Portfolio en Corée en 2008, ainsi que Performics Search Marketing, division de Google (ex-DoubleClick) spécialiste des liens sponsorisés la même année, Razorfish à Microsoft en 2009, et au début de cette année Rosetta…

Il y a quelques semaines, Publicis a racheté Big Fuel, une agence new-yorkaise spécialisée dans les médias sociaux.

Pour autant, il convient de saluer l’habile stratégie d’acquisition de Maurice Levy  pour pallier à l’incapacité industrielle organique de son groupe dans la communication digitale…

De son coté, France Télécom n’a pas su démontrer sa grande capacité d’innovation ces dernières années.

Preuve s’il en est qu’Orange Valley, symbole du génie créatif de son dirigeant emblématique Didier Lombard vient de disparaître, absorbé sans tambours ni trompettes par les services de R&D de France Télécom.

Au début des années 2000, France Télécom a procédé à l’acquisition de quelques start-up qu’il a été incapable d’intégrer et qui se sont dissoutes dans le magma technocratique de l’ex-géant français des télécoms.

France Télécom a raté toutes les grandes innovations technologiques : son moteur de recherche Voilà est inexistant; il est absent des réseaux sociaux auquel son dirigeant ne croyait pas; sur le commerce en ligne, Alapage a été un échec cuisant…Quant à l’internet mobile, il aura fallu attendre Apple et son iPhone.

France Télécom possède déjà un fond dédié à l’innovation : Innovacom. Pour autant , rares sont les synergies avec le groupe.

Dès lors,  que penser de cette opération ?  Une simple annonce médiatique ? Une initiative visant à masquer le bilan particulièrement maigre d’un e-G8 dispendieux ?

Si certains dirigeants prennent conscience de l’incapacité des grands groupes français à faire vivre en leur sein de véritables structures générant de l’innovation, il serait peut-être temps qu’ils comprennent que les seules logiques financières qui animent leur management ne peuvent que conduire à l’étouffement de la créativité du personnel de leurs entreprises.