Salariés et sortie de crise : une étude TNS Sofres

TNS Sofres vient de publier une étude sur la relation des employés avec leurs entreprises et le système économique. L’analyse globale de TNS est édifiante. Extraits :

L’étude révèle en tout premier lieu une remise en cause massive du système actuel par les salariés français :

* Les ¾ estiment que la crise a prouvé qu’il apportait plus de problème que de solution
* La même proportion estime que les intérêts des entreprises (ou de leurs dirigeants) et des salariés ne vont pas dans le même sens
* La quasi-totalité se dit choquée par au moins une des caractéristiques du système
* Les termes de profit, de mondialisation, de capitalisme sont massivement associés à des évocations négatives
* L’effet « le système va mal mais dans mon entreprise / administration ça se passe beaucoup mieux » semble moins fort que par le passé

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Image hey mr glen (Flickr) sous licence CC by-nc

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«Les Impactés», la crise de France Télécom

Mediapart propose sur son site un documentaire vidéo retraçant la mise en oeuvre d’une pièce de théâtre « Les Impactés« , créée en 2007 par la compagnie NAJE à l’initiative des élus du CE de la Direction Territoriale Ile de France de France Télécom.

Caricature ? Non, simple mise en évidence d’une réalité vécue, basée sur une enquête terrain et des témoignages de salariés. La démarche de « théâtre forum », qui invite en fin de spectacle les spectateurs à monter sur scène pour remplacer les comédiens et faire évoluer le scénario est particulièrement intéressante et révélatrice.

A voir sur le site de Mediapart.

La responsabilité sociale de France Télécom

Dans La Tribune de ce jour, Jean-Marc Le Gall, professeur associé au Celsa et conseil en stratégies sociales, fait quelques constats que la CFE-CGC/UNSA a mis en évidence depuis de (trop) longs mois. Extraits :

« Le groupe s’engage à agir en permanence comme un employeur responsable », peut-on lire dans le Rapport responsabilité d’entreprise et développement durable 2008 de France Télécom-Orange publié en juin dernier. Engagement attendu dans un tel rapport, puisque la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) est l’intégration volontaire par l’entreprise de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes, dont font partie ses salariés. Pourtant, confronté à la dramatique actualité sociale de cette entreprise, il est difficile de prendre cet engagement au sérieux.

Risquons une hypothèse : si le bilan économique du président de France Télécom était aussi mauvais que son bilan social, il aurait quitté l’entreprise comme Michel Bon en 2002, ou il aurait été remercié par son actionnaire principal. Sans aucun doute, il y a encore loin de la responsabilité économique à la responsabilité sociale. Des dirigeants d’entreprise s’efforcent pourtant de rapprocher ces deux dimensions, comme Frank Riboud qui a décidé que le bonus des dirigeants de Danone devait porter pour moitié à la fois sur des réalisations tenant à cette RSE et sur les résultats économiques. Responsabilité oblige.

L’article mentionne également le livre d’Yvan du Roy, Orange Stressé, et nous ne pouvons qu’adhérer à l’analyse de Monsieur Le Gall.

En tant que salariés de l’entreprise et en tant que syndicalistes, nous espérons que les réalités enfin dévoilées, et surtout prises au sérieux par une part de plus en plus large de la société française, vont conduire à de réels changements dans le pilotage des entreprises. Pour une fois, il n’est pas exagéré de dire que c’est… vital!

Lire l’article dans son intégralité sur le site de La Tribune.

4ème licence mobile : une régulation socialement irresponsable

Comme on pouvait s’y attendre, Free sera finalement le seul candidat à la 4ème licence mobile, et l’Arcep rendra sa décision avant Noël, ou tout début 2010. Si chef de l’État s’est montré « réservé » sur le dossier, Monsieur Silicani, actuel président de l’Arcep, revendique haut et fort l’indépendance du régulateur français dans sa validation ou non du dossier d’Iliad/Free.

Il va sans dire que cette décision sera analysée à la loupe par l’ensemble des observateurs.

Leyla Insane
Leyla Insane

image: Katey (Flickr) sous licence CC by – nc – nd

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France Télécom: un cas d’école dans un système mortifère

Sur Mediapart, le philosophe Pierre Dardot et le sociologue Christian Laval reviennent à travers l’affaire France Télécom sur la fabrique du «sujet néolibéral» et ses effets.

Quelques extraits pour vous mettre l’eau à la bouche :

Périodiquement on redécouvre, pour l’oublier bien vite, que quelque chose « ne tourne pas rond » dans le monde du travail. Les suicides en série au Technopôle de Renault ne sont pourtant pas si lointains.. Sociologues et psychanalystes ont longuement décrit et analysé les diverses formes prises par la « crise du travail ». Mais « la souffrance au travail » dont on parle beaucoup aujourd’hui ne tombe pas du ciel, elle ne relève pas seulement d’un traitement thérapeutique en forme d’ « accompagnement psy », elle résulte avant tout de pratiques et de dispositifs qui ont profondément modifié l’organisation des entreprises et les relations professionnelles.

A cet égard, le cas de France Télécom – qui s’appellera bientôt Orange pour faire oublier son ancrage national- est tragiquement exemplaire. Voici une entité qui est passée en quelques années de l’univers du monopole de service public à celui de la multinationale de plain-pied dans le capitalisme mondialisé et financiarisé. Cela s’est fait à coup de changements de statut, d’ouvertures du capital  et de privatisations menés par tous les gouvernements de droite comme de gauche depuis 1990. L’histoire de France Télécom, c’est en réduction et en caricature,  l’histoire du déploiement implacable d’une logique de concurrence généralisée qui fait se rejoindre les horizons les plus lointains des marchés globalisés et les subjectivités les plus intimes des salariés. France Télécom  c’est donc notre histoire collective qui se lit dans l’histoire d’une entreprise et de ses salariés. Pour tout dire, on a là affaire à un cas d’école de l’expérimentation néolibérale.

Une analyse remarquable et bien argumentée, à lire en intégralité sur Mediapart.

La négation de tous les médiateurs sociaux dans l’entreprise : une politique dévastatrice et délibérée chez France Télécom

Alors que de nombreux médias, et de nombreux français, s’interrogent sur la vague de suicides chez France Télécom, se demandant « comment on a pu en arriver là », on entend ça et là une remise en question des syndicats, qui « n’auraient pas été présents » pour accompagner les salariés et éviter la dégradation dramatique des conditions de travail dans l’entreprise.

Un mécanisme pervers articulé en trois temps

L’examen approfondi de la situation met en évidence une réalité beaucoup plus grave. Les méthodes de gestion de l’entreprise, entièrement calées sur une « culture du chiffre », où l’on ne s’intéresse plus qu’aux cours de bourse et aux indicateurs qui permettront de satisfaire l’exigence, exorbitante, des marchés financiers, a totalement mis de côté le facteur humain. L’idéologie du capitalisme financier semble avoir trouvé au sein de France Télécom un lieu de mise en application de ses fantasmes les plus fous. Sébastien Crozier l’exprime dans une récente interview à itexpresso : « A l’instar de Serge Tchuruk, ex-P-DG d’Alcatel, qui voulait faire une entreprise sans usines, la direction de France Télécom veut faire d’Orange une marque sans salariés ».

Il s’agit donc de marginaliser la parole des personnels en appliquant une politique de déni, qui évacue les alertes syndicales, neutralise les médecins du travail, et supprime les ressources humaines de proximité.

Cones on Steps
Cones on Steps

Image hey mr glen (Flickr) sous licence CC by-nc

On peut ainsi se concentrer sur l’objectif : comprimer chaque année davantage le nombre de salariés, pour améliorer le fameux « cash-flow », que le Conseil d’Administration dédie pour moitié au versement de dividendes. Continue reading « La négation de tous les médiateurs sociaux dans l’entreprise : une politique dévastatrice et délibérée chez France Télécom »

Impunément, travailler tue

Sur le blog de Gilles Raveau :

“Sinistres mais révélateurs, les suicides à France Telecom ne doivent pas devenir l’arbre qui cache la forêt. Car, depuis des dizaines d’années, des salariés meurent deux fois. Physiquement, puis symboliquement. Ils meurent car ils travaillent. Ensuite, ils meurent du silence et du mépris ; de l’absence de reconnaissance pénale, médicale et publique, des causes professionnelles de leurs décès.” C’est ce qu’explique très bien ce magnifique texte signé dans le cadre de l’initiative de la Fondation Copernic “travailler tue impunément”.

La suite sur le blog de Gilles Raveau

« Orange stressé » vient de paraître aux éditions La Découverte

Pour comprendre la réalité du management par le stress, Yvan du Roy a mené l’enquête auprès de salariés, de syndicalistes, de médecins et d’experts de la santé au travail.

Relatant le vécu quotidien des salariés de France Télécom, il retrace l’historique de l’opérateur depuis sa privatisation, et montre comment l’entreprise a basculé dans la course au profit financier de court terme, où le personnel est considéré comme une charge, et, notamment sur les plateaux d’appels, littéralement comme une « armée de robots » pilotés par des applications informatiques qui ne leur laissent aucun répit.

Recherche de la productivité maximale, mais aussi volonté à peine voilée de pousser les salariés vers la sortie,  au travers de fermetures de sites et de réorganisations permanente dont l’efficacité opérationnelle reste à démontrer. Les salariés sont contraints à des reconversions brutales, souvent déqualifiantes, et à des déplacements quotidiens de plus en plus lourds pour rejoindre les locaux de l’entreprise, qui se concentrent dans les grandes agglomérations.

Le journaliste s’est notamment appuyé sur les travaux de l’Observatoire du stress et des mobilités forcées à France Télécom, une association mise en place en 2007 par la CFE-CGC/UNSA et SUD pour comprendre et agir contre les causes du stress dans l’entreprise.  Pierre Morville (CFE-CGC/UNSA) et Patrick Ackermann (SUD) ont postfacé l’ouvrage.

Yvan du Roy présente son livre dans une interview vidéo réalisée par Bachchich :


La « crise » est d’abord une crise de confiance généralisée

Le Monde relate les points clefs des XXIVes Rencontres de Pétrarque, centrées cette année sur le thème « Après la crise, quelle(s) révolution(s) ? ».

Les conclusions ne sont pas très optimistes, et ne débouchent pas sur une voie toute tracée, d’autant moins que le vocabulaire semble devoir être ré-étalonné, et qu’il n’y a pas de projet motivant en perspective. Citation :

Si la guerre est apparue comme une perspective vraisemblable, il n’en fut pas de même de la révolution. A partir de prémices opposées, Alain Krivine, cofondateur du Nouveau Parti anticapitaliste, et l’historien Alain-Gérard Slama, sont parvenus à une conclusion semblable : la crise suscite une colère profonde, mais pour que celle-ci débouche sur un soulèvement, il faut une alternative. Or il n’existe plus aucune « promesse de bonheur collectif », a dit M. Slama ; partout le « chacun pour soi » l’emporte sur le « tous ensemble », a complété M. Krivine.

Si vous avez le coeur bien accroché et ne souhaitez pas « bronzer idiot », vous pouvez écouter Les Rencontres de Pétrarque : elles seront diffusées sur France Culture du 10 au 14 août, de 20 h 30 à 22 heures.

La fin d’un certain monde ultralibéral

Dans une interview à La Tribune, le philosophe André Comte-Sponville s’exprime sur les leçons de la crise.  Citation :

D’abord l’amoralité du capitalisme. Certains se sont enrichis scandaleusement, y compris en laissant leur entreprise au bord de la faillite, quand d’autres, qui ont fait leur travail correctement, se retrouve au chômage ou dans la misère. Vous trouvez ça moral ? La crise confirme aussi que le capitalisme est incapable de se réguler lui-même d’une façon socialement et moralement acceptable. Il y a certes une autorégulation du marché (c’est le cas, notamment, de cette crise), mais qui produit des effets moralement choquants et socialement destructeurs. Bref, les ultralibéraux avaient tort. Le marché ne suffit pas à tout.Troisième confirmation: cette crise nous montre une nouvelle fois que la morale est incapable de réguler l’économie. Ce n’est pas nouveau. Si on avait compté sur la conscience morale des chefs d’entreprise pour améliorer le sort de la classe ouvrière, nous serions toujours au XIXe siècle ou chez Zola. Mais la crise l’illustre une nouvelle fois. Si on avait compté sur la conscience morale des banquiers pour éviter les crises financières, nous serions… dans la crise que nous connaissons ! D’où une quatrième et dernière confirmation. Si le marché est incapable de se réguler suffisamment lui-même, et si la morale est tout aussi incapable de réguler l’économie, que reste-t-il? Il ne reste que le droit et la politique! C’est ce qu’on appelle aujourd’hui « le retour des États », et c’est une bonne nouvelle. Il s’agit de fixer des limites non marchandes au marché. Ce n’est pas la fin du libéralisme, bien au contraire, mais la fin, au moins provisoire, d’un certain nombre d’illusions ultralibérales.

Le titre de l’article n’est pas sans évoquer le thème de l’Université d’été de la CFE-CGC/Unsa: « La fin d’un certain capitalisme », qui s’est tenue les 6 et 7 juillet derniers, et dont nous vous reparlerons très bientôt.

France Télécom s’implante enfin au Maghreb… mais à quel prix!

Le 29 juin dernier, la presse annonçait que le consortium Orange / Divona Télécom remportait la 3ème licence de téléphonie fixe et mobile 2G/3G en Tunisie.

C’est plutôt une bonne nouvelle pour France Télécom, qui avait échoué en 2006 à entrer au capital de l’opérateur historique Tunisie Télécom, et qui n’avait jusqu’ici aucune implantation au Maghreb. La présence d’une importante diaspora tunisienne en France constitue en effet un atout supplémentaire pour l’opérateur, déjà fortement présent par ailleurs en Afrique, et pourrait même lui permettre de développer des offres innovantes en France pour mieux relier les deux pays.

Land for Sale. It's in Gabes, Tunisia, and the numbers is not the price but the phone number to call...
Land for Sale. It's in Gabes, Tunisia, and the numbers is not the price but the phone number to call...

Image DeCyner (Flickr) sous licence CC by-nc-sa

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Bernard Stiegler : “Il y a beaucoup d’inventions qui ne produisent aucune innovation”

« Constatant l’échec du consumérisme, le philosophe Bernard Stiegler soutient que seule l’intelligence collective permettra une économie innovante. »
C’est ainsi que Télérama introduit un passionnant entretien, qui resitue l’innovation dans une perspective historique, en relation avec les théories économiques dominantes des différentes époques industrielles.

Évoquant l’innovation dans les télécommunications, Bernard Stiegler dit notamment :

Le Cnet (Centre national d’études des télécommunications), ancêtre d’Orange Labs, était un des meilleurs laboratoires de recherche au monde. Mais en France, où il y a d’excellents chercheurs, le management ne sait pas valoriser la recherche – le nez collé sur le court terme, il accuse d’autant plus les chercheurs de conservatisme qu’il manque de vision de l’avenir et refuse de prendre des risques.

La vie privée, un problème de vieux cons ?

Le Monde publie une intéressante réflexion menée par les équipes d’InternetActu sur la manière dont les internautes abordent la question des risques d’Internet pour la vie privée.
Tandis que les plus âgés identifient un vrai risque, les plus jeunes y voient une opportunité de liberté pour façonner leur identité sur Internet.